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arrivant par l’aspect de ces immenses hangars dont le toit s’appuie de distance en distance sur des colonnes de métal? Les machines sont lourdes et puissantes; elles se meuvent, véritables mastodontes de l’industrie, avec une lenteur solennelle, mais aussi avec une régularité terrible qui brise toutes les résistances. Là se trouve le plus grand cylindre soufflant, blowing cylinder, qui ait été construit dans la Grande-Bretagne et par conséquent dans le monde; il frappe vingt doubles coups par minute. Quelques détails statistiques donneront une idée de l’importance de ces grandes usines welshes. Celle de Dowlais extrait de ses mines 600,000 tonnes par an de charbon de terre, dont 400,000 sont consumées dans la fabrique et 200,000 sont exploitées pour servir de combustible aux bateaux à vapeur ou aux locomotives des chemins de fer. Elle possède dix-sept fournaises pour fondre le minerai, blast furnaces, dont quinze sont toujours en activité. Qu’on ajoute à cela cent cinquante-quatre fournaises pour épaissir le fer liquide, puddling furnaces, parmi lesquelles quatre-vingt-dix travaillent sans cesse. La quantité de fonte, pig iron, produite par an est de 140,000 tonnes. Ce colossal établissement occupe huit mille ouvriers et six cents chevaux. Le prix du travail varie selon le prix du fer sur le marché; mais quand les salaires sont hauts, l’usine paie à ses ouvriers 9,000 liv. sterl. (225,000 francs) par semaine[1]. On construit en outre sur les lieux en ce moment d’autres ateliers pour faire de l’acier selon le procédé nouveau, Bessemer system, et qui permettront de fabriquer 20,000 tonnes de ce métal par an. L’acier sera converti en plaques pour construire surtout des frégates cuirassées. Encore n’est-ce pas seulement à Merthyr Tydvil que prospèrent les iron-works ; ils s’étendent dans le Glamorganshire sur un rayon d’une quarantaine de milles, groupés çà et là dans les vallées ou sur le versant des collines. Plus se développe la liberté du commerce, et plus les grandes industries tendent chez nos voisins à se localiser. Des comtés tout entiers deviennent de vastes ateliers de travail, représentant ici les forges de l’Angleterre, ailleurs ses salines, plus loin ses poteries. Les principales fabriques aussi bien que l’agriculture s’attachent à la terre, ou pour mieux dire à la nature du sous-sol comme à une mamelle féconde où elles puisent l’aliment de leur force et de leur activité.

Les maisons des ouvriers s’alignent autour des usines de Dowlais. Je trouvai aux habitations meilleur air qu’aux habitans eux-mêmes. Le plus souvent, peintes d’une bordure verte autour de la porte et

  1. Le directeur des travaux de Dowlais, M. Menclaus, jouit d’une grande réputation parmi les métallurgistes.