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auxquelles vint s’adjoindre la Prusse, — cette fois ouvertement et publiquement, — proclamaient, dans le traité de Londres du 8 mai 1852 et d’une manière irrévocable, les : droits du prince de Glücksbourg à « succéder à la totalité des états actuellement réunis sous le sceptre de sa majesté le roi Frédéric VII, » et reconnaissaient en outre « comme permanent le principe de l’intégrité de la monarchie danoise[1]. »

Par malheur, bien plus permanent se montrait dès lors un autre « principe » qui devait tôt ou tard détruire l’œuvre de Londres. Les Allemands n’avaient cessé de camper sur le territoire danois pendant que la diplomatie européenne était occupée de ces laborieuses négociations ; Ils étaient entrés en 1848 dans les duchés pour les ravir au roi Frédéric VII : ils y restaient pendant les années 1850 et 1851 afin de rétablir dans le Holstein « l’autorité légitime » du même roi au nom de la confédération ! et ils ne se retirèrent définitivement au commencement de 1852 qu’après avoir obtenu de la cour de Copenhague certains « éclaircissemens » dont il était aisé de prévoir les conséquences fatales et désastreuses. Ce n’étaient, à vrai dire, que de simples explications ;[2], ou, si l’on veut, un échange « amical » d’idées, et le traité définitif de Londres n’en faisait aucune mention. Le tout s’était borné à quelques phrases insérées dans une correspondance du ministre danois avec les cours allemandes ; mais c’était assez pour fournir à l’adversaire une arme redoutable dont il se promit bien de faire usage au moment opportun. Dans cette correspondance malheureuse, il était parlé en

  1. Ont déclaré adhérer au traité de Londres (outre la Hollande, la Belgique, l’Espagne, le Portugal, la Grèce et les souverains de l’Italie) parmi les états de la confédération germanique : le Hanovre, la Saxe, le Wurtemberg, la Hesse électorale et l’Oldenbourg ; seuls la Bavière, Bade, la Hesse-Darmstadt, le Meeklembourg et la Saxe-Weimar n’avaient pas accédé. Or les états allemands qui avaient donné leur sanction au traité formaient, avec l’Autriche et la Prusse, plus de la moitié, plus des deux tiers même de la confédération, et cependant la confédération devait plus tard déclarer ne pas être liée par un traité auquel manquait l’assentiment de la diète fédérale !… Il est utile aussi de rappeler les termes dont s’est servi M. de Beust dans sa note du 2 décembre 1852 à l’égard de ces stipulations de Londres qu’il devait si complétement répudier en 1864, Dans cette note, M. de Beust « se plaisait à reconnaître la sagesse des vues et la sollicitude pour les grands intérêts politiques de l’Europe dont les hautes parties contractantes ont donné dans cette circonstance un nouvel et éclatant témoignage. » Le ministre de Saxe n’hésitait pas à déclarer son assentiment au traité signé à Londres le 8 mai passé, « s’associant ainsi à une combinaison qui servait à maintenir l’intégrité de la monarchie danoise et à assurer en même temps la conservation de la paix générale. »
  2. « Les droits souverains du roi de Danemark nous sont sacrés ; mais, selon notre conviction la plus profonde, il ne leur serait porté aucune atteinte, si la position de sa majesté l’amenait à donner des éclaircissemens (Erläuterungen) à ses confédérés. » (Dépêche du prince Schwarzenberg du 26 décembre 1851.)