de choses normal et de restituer Lyon au droit commun. Pour cette grande ville, c’eût été justice, pour la France entière du meilleur exemple, et les institutions actuelles en eussent été singulièrement affermies. Montrer l’ordre victorieux, les passions apaisées, la vie municipale fonctionnant avec régularité là même où l’anarchie semblait un mal chronique, quel plus beau succès à obtenir, quel meilleur argument à opposer aux contradicteurs ou aux malveillans ? Rien n’interdit d’espérer un tel résultat. Sur 156,100 individus que le suffrage universel appelle à voter, il ne faut pas oublier que 20,000 sont adonnés aux professions libérales, près de 22,000 forment la bourgeoisie, le clergé en compte un millier, et même dans les 90,000 hommes voués à l’industrie, si l’on s’arrête principalement aux industries textiles, on ne trouve que 15,000 ouvriers proprement dits contre 11,648 chefs de famille. Ce sont là des élémens rassurans pour l’ordre, dont une administration conciliante tirerait aisément parti.
Nous ne croyons pas nous abandonner à un optimisme excessif en affirmant que dans la classe ouvrière, à Lyon comme partout, plus à Lyon même qu’en d’autres centres industriels, les principes conservateurs, entendus, il est vrai, dans un sens de plus en plus large et libéral, sont appelés à trouver d’énergiques défenseurs. C’est affaire d’instruction, d’éducation économique surtout ; or bien des symptômes se sont produits qui peuvent donner à ce sujet de légitimes espérances. Les dix-sept années écoulées depuis la révolution de février n’ont pas été sans porter leurs fruits. Aux derniers rangs de la population ouvrière, — les malveillans, et ils sont trop nombreux mis à part, — aucun, même parmi les plus ignorans, n’attend aujourd’hui d’une formule tyrannique imposée d’en haut l’établissement parmi les hommes d’une égalité chimérique et la certitude d’un bien-être universel qui n’est pas de ce monde. C’est à leur initiative seule, au libre exercice de leurs facultés, que les travailleurs de tout rang, que les salariés eux-mêmes demandent l’amélioration dont ils sont avides. Parmi les moyens à leur portée, ils placent toujours en première ligne l’association, mais l’association volontaire, et ils commencent à croire aux bons effets de l’épargne et de la prévoyance. Aussi peut-on aborder aujourd’hui les problèmes sociaux avec une confiance plus grande et penser à l’avenir avec plus de sécurité ; mais, si l’heure est propice, il ne faut pas la laisser s’écouler en vain. L’administration supérieure, cette tutrice de tous les intérêts dans les départemens et les communes, n’a pas eu jusqu’à ce jour assez de souci des besoins intellectuels, de ce qu’on peut appeler le « droit à l’instruction, » appendice obligé du droit de suffrage. Le courageux rapport de M. le ministre de l’in-