paru trop souvent disposé, à des velléités d’agrandissement extérieur, dangereuses chimères fondées sur une complète ignorance des nécessités actuelles de la politique et des obstacles absolus qu’elle mettrait à de tels projets[1]. » Si ce programme eût été suivi, la Grèce aurait échappé sûrement aux crises financières et politiques qui ont un instant compromis ses destinées, et dont elle ne peut éviter le retour que par la pratique franche et persévérante de ces salutaires enseignemens.
La Russie elle-même, jusqu’à présent sobre de sages conseils, est venue enfin associer ses remontrances à celles des deux autres cours. « Que la Grèce s’adonne aux arts pacifiques et à l’industrie, a dit récemment le comte Bloudof, doyen du corps diplomatique à Athènes[2] ; on verra bientôt renaître, au pied de l’Acropole et sous le plus beau ciel du monde, un édifice social capable de rivaliser de splendeur avec les ruines superbes qui dominent la ville, et du sein desquelles les Euménides, entourées du triste cortège des discordes civiles, s’enfuiront surprises et le visage voilé. »
Nous avons nous-même, et en esquissant la physionomie d’une province demi-barbare[3], voulu indiquer le caractère des transformations intérieures auxquelles la Grèce doit désormais consacrer son activité. Après avoir montré combien il reste à faire au gouvernement pour affermir le progrès moral et le bien-être physique des populations, et après avoir reproduit quelques-unes des sollicitations pressantes par lesquelles tant de voix éloquentes et sympathiques ont essayé de déterminer la Grèce à s’adonner au développement de ses ressources matérielles, nous croyons utile de faire connaître aussi quelles sont ces ressources, quels élémens nombreux et réels de prospérité possède ce pays, que les Grecs modernes nous ont trop habitués à considérer comme frappé d’une stérilité irrémédiable et condamné par la nature à une éternelle pauvreté. Aujourd’hui d’ailleurs c’est une sorte de renaissance industrielle qui commence en Grèce. Au pied des rochers arides et des hautes cimes escarpées qui dessinent d’une façon si pittoresque et en même temps si harmonieuse les lignes supérieures du paysage grec, s’étendent de vastes plaines et de larges vallées dont le sol, livré par l’incurie des habitans et de l’administration à la merci des torrens et des inondations, est cependant doué d’une merveilleuse fertilité, propre aux genres de culture les plus variés, ne demandant à l’homme qu’un travail modéré pour laisser éclore toutes les richesses dont il renferme le principe dans son sein. Les Grecs modernes ont follement négligé ces germes de prospérité ; mais en