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flans, Prades, Villeneuve, s’étaient aussi déclarés contre la gabelle. Le conseil de Roussillon intervint avec douceur, apaisa les haines, fit comprendre l’inutilité de la lutte. Tout en fortifiant les garnisons, on prit des arrangemens avec les communes, et les miquelets obtinrent grâce entière. Moins grave sans doute que celle des Landes, la révolte, qui coïncidait avec quelques troubles dans le Vivarais, fut des plus sérieuses. Ici encore le gouvernement, bien inspiré, finit par se montrer indulgent, Quant aux populations, désarmées, vaincues, elles subirent désormais le joug commun.


II

Plusieurs années se passèrent pendant lesquelles le calme dont jouissait Paris semble s’être étendu aux provinces, ou, si quelques mouvemens s’y produisirent, ils eurent peu d’importance. Il faut arriver à l’année 1675 pour rencontrer les deux, insurrections les plus formidables du règne. La guerre de Hollande, commencée avec tant d’éclat, mais que les incroyables exigences du secrétaire d’état de la guerre prolongèrent plus de six ans, avait fini par imposer de dures nécessités au contrôleur-général, Il avait eu le tort de la désirer et d’y contribuer, dans l’espoir de ruiner l’industrieuse république et de voir la France s’approprier son commerce d’Europe et des Indes. Quels ne durent pas être ses regrets quand il la vit s’éterniser et qu’il lui fallut écraser de nouveaux impôts, des provinces appauvries où, faute d’hommes, et d’argent, tout travail s’était pour ainsi dire arrêté ! C’est le temps des créations d’offices inutiles entravant le commerce et renchérissant les denrées, des emprunts onéreux, de l’établissement du papier timbré et du droit de marque sur la vaisselle d’étain, de l’augmentation des gabelles et des taxes sur le tabac et les corporations d’ouvriers. Pour l’entretien d’une armée de trois cent mille hommes, la plus considérable que la royauté eût encore mise, sur pied, Colbert avait dû se résigner aux mesures qu’il désapprouvait le plus. Partout ces affaires extraordinaires, c’est ainsi qu’on les nommait, occasionnèrent des murmures, par malheur trop fondés ; mais nulle part l’émotion ne fut aussi vive qu’en Guienne, et surtout en Bretagne.

Les premiers troubles éclatèrent à Bordeaux, où l’autorité, prise à l’improviste, se vit obligée de rendre des prisonniers et d’accorder une amnistie générale, à laquelle succédèrent bientôt de nouveaux désordres. Des correspondances nombreuses permettent de suivre les phases de cette révolte, qui rappelait celle de 1548, provoquée également, par l’augmentation d’un impôt, celui du sel, et