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écoles profanes. Son livre offre un exposé complet où toutes les parties du sujet sont discutées, où du moins rien n’est omis d’essentiel. C’est presque un traité de christianisme, recommandable par la pensée comme par l’érudition. S’il y reste des lacunes et des obscurités, j’ai bien peur qu’il ne faille s’en prendre aux vides de la connaissance humaine en pareille matière, vides que les religions mêmes ont vainement prétendu combler.

L’ouvrage de M. Naville est d’un autre genre, quoique dans le même esprit. Ce n’est plus un traité scientifique, ce sont sept discours ou plutôt sept sermons, car ils n’auraient pas été déplacés dans la chaire évangélique, et le ton, oratoire sans déclamation, est plus propre à gagner et à toucher l’auditeur que la diction froide de l’érudit et du critique. Ce n’est pas que M. Ernest Naville se contente de traiter des questions aussi sérieuses avec une éloquence superficielle. Ancien professeur de philosophie, il les étudie en elles-mêmes et pour elles-mêmes, et, quoique décidé d’avance à les résoudre chrétiennement, il ne néglige presqu’aucune des armes que la raison peut prêter à la foi. Il est un de ces philosophes qui aiment et cultivent la science, mais qui trembleraient de la voir longtemps cheminer sans l’appui de la révélation. L’objet de son étude n’est pas, comme il le dit lui-même, une survivance quelconque des âmes, une sorte d’immortalité anonyme, c’est la vie éternelle offerte et promise par Jésus-Christ. C’est la philosophie de l’Évangile qu’il a prêchée devant un auditoire de croyans avec un talent qui n’a jamais été mieux inspiré. A ceux qu’effaroucheraient les analyses et les recherches toujours un peu scientifiques de M. Henri Martin, nous recommanderons avec confiance les sept oraisons de M. Ernest Naville. Avec plus d’ornement et de mouvement, la pensée n’en repose pas moins sur un fonds solide de connaissances et de réflexions, et, en s’inquiétant particulièrement de l’état actuel des esprits et des attaques de la critique contemporaine, l’orateur a su donner à sa parole un à-propos qui la rend plus propre à pénétrer dans les âmes et à s’y graver.


II

Dans les jours où j’écris, grand est le nombre de ceux qui goûtent peu les vérités religieuses quand on les sépare d’une foi positive, et qui iraient jusqu’à les dédaigner, si on les leur présentait dégagées de la garantie d’un appel au surnaturel. Je ne juge pas cette disposition, qui aurait fort surpris, il y a une trentaine d’années, une bonne partie de ceux-là mêmes qui l’éprouvent à présent ; je la constate et j’y défère, lorsqu’ayant à discuter sur la vie fu-