tervenir des conditions de phénomènes qu’on peut appeler vitales, parce qu’elles ne se produisent pas en dehors de l’organisme vivant, sain ou malade[1].
Enfin la connaissance du déterminisme physico-chimique initial des phénomènes complexes physiologiques ou pathologiques permettra seule au physiologiste d’agir rationnellement sur les phénomènes de la vie et d’étendre sur eux sa puissance d’une manière aussi sûre que le font le physicien et le chimiste pour les phénomènes des corps bruts. Toutefois il ne faudrait pas nous abuser sur notre puissance, car nous obéissons à la nature au lieu de lui commander. Nous ne pouvons en réalité connaître les phénomènes de la nature que par leur relation avec leur cause déterminante ou prochaine. Or la loi n’est rien autre chose que cette relation établie numériquement de manière à faire prévoir le rapport de la cause à l’effet dans tous les cas donnés. C’est ce rapport, établi par l’observation, qui permet à l’astronome de prédire les phénomènes célestes ; c’est encore ce même rapport, établi par l’observation et par l’expérience, qui permet au physicien, au chimiste et au physiologiste non-seulement de prédire les phénomènes de la nature, mais encore de les modifier à son gré et à coup sûr, pourvu qu’il ne sorte pas des rapports que l’expérience lui a indiqués, c’est-à-dire de la loi. Ceci veut dire, en d’autres termes, que nous ne pouvons gouverner les phénomènes de la nature qu’en nous soumettant aux lois qui les régissent.
L’expérimentateur ne peut changer les lois de la nature. Il agit sur les phénomènes, quand il en connaît le déterminisme physicochimique ; mais il ne lui est donné ni de les créer de toutes pièces ni de les anéantir absolument ; il ne peut que les modifier. Les conditions physico-chimiques des phénomènes sont d’autant plus faciles à analyser et à préciser que le phénomène est plus simple ; mais au fond et dans tous les cas, ainsi que nous l’avons dit, la cause première du phénomène reste entièrement impénétrable. L’expérimentateur peut donc plus qu’il ne sait, et, quelle que soit la manière dont son esprit conçoive les forces de la nature, vitales ou minérales, son problème est toujours le même : déterminer les conditions matérielles dans lesquelles un phénomène apparaît ; puis, ces conditions étant connues, les réaliser ou non, pour faire apparaître ou disparaître le phénomène. Pour produire un phéno-
- ↑ Je pourrais citer beaucoup d’exemples pour prouver ce que j’avance. Je me bornerai à rappeler mes recherches sur l’action du curare publiées dans la Revue, et dans lesquelles on peut voir comment la lésion physique d’une extrémité nerveuse motrice retentit successivement sur tous les autres élémens vitaux, et amène des déterminismes secondaires qui vont se compliquant de plus en plus jusqu’à la mort.