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Les derniers chapitres du livre de M. Daremberg traitent de sujets plus modernes, de l’histoire de la circulation, des causes finales, de la physiologie et de l’anatomie, ou de la médecine actuelle, de l’hygiène, c’est-à-dire de la meilleure médecine de tous les temps, enfin de la mort, qui est comme la conclusion naturelle de l’œuvre d’un médecin.


PAUL DE REMUSAT.



l’Hygiène publique chez les Juifs, son importance et sa signification dans l’histoire générale de la civilisation, par M. le docteur Marc Borchard[1].


L’auteur de cet écrit, préparé à sa tâche par de savantes recherches sur l’antique législation des Hébreux, a pris comme point de départ les dispositions du Pentateuque concernant l’hygiène pour tracer un intéressant programme d’histoire à la fois médicale, religieuse, politique et morale. La place importante réservée dans les lois juives à l’hygiène lui paraît tout d’abord n’être rien moins qu’une preuve de l’origine divine de ces lois : elles seules, à son gré, bien autrement sages que les législations tout humaines, ont su reconnaître la double nature de l’homme et traiter la civilisation naissante comme la mère traite l’enfant, c’est-à-dire qu’elles se sont bien gardées de négliger les soins du corps, et que par là elles ont rendu possible entre les hommes la formation des premières associations dignes du beau nom de cités. Ce don de prévoyance sociale paraîtrait inconciliable avec l’institution de l’esclavage et avec la haine de l’étranger ; aussi l’auteur n’accepte-t-il ni l’un ni l’autre de ces deux reproches à la charge de l’ancien peuple hébreu. Pour la haine de l’étranger, il invoque les curieux commentaires de M. Ewald sur le Deutéronome, et, quant à l’esclavage, il montre que, si les Hébreux, l’ayant trouvé établi dans le monde et ayant été eux-mêmes esclaves en Égypte, n’ont pas tout d’abord aboli la servitude, ils en ont du moins énergiquement préparé la disparition. Pour la première fois dans le monde, des prescriptions générales ont été publiées par la législation juive en faveur des esclaves, sans distinction de nationalité ; la loi a déclaré leur entière égalité devant Dieu, elle les a armés de droits importans vis-à-vis du maître, elle les a protégés fugitifs ; elle a ordonné, pour de certaines époques régulièrement fixées, leur émancipation après six ans de service. « Celui qui m’a créé dans le sein de ma mère, dit Job, n’a-t-il pas aussi créé celui qui me sert ? Et n’est-ce pas le même Dieu qui nous a formés tous deux ? »

La position respectée de la femme, la procédure pénale fondée sur l’expertise médicale, l’assistance publique organisée à côté de la bienfaisance privée, de manière à éviter le paupérisme chez un peuple qui compta, non pas huit mille citoyens, comme Sparte, mais quatre millions d’hommes à peu près égaux, ce sont autant de points que M. le docteur Borchard fait

  1. Paris 1865, in-8o. À la Librairie Internationale A. Lacroix, Verboeckhoven et Co boulevard Montmartre, 15, au coin de la rue Vivienne.