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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/322

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de hautes influences ; mais ce qui est bien certain, quoi qu’on en dise, c’est que le gouvernement ne cherche point à saper les bases de l’église en Angleterre.

L’enseignement primaire est malgré tout sous la main du clergé. S’agit-il par exemple de nommer un instituteur, ce dernier est choisi par le vicaire de la paroisse, qui dans certains cas est le seul directeur (manager) de l’école ; le plus souvent néanmoins quatre ou cinq laïques, membres de l’église d’Angleterre, élus par les souscripteurs, et dont les noms se trouvent mentionnés dans l’acte de fondation (trust deed), assistent le pasteur dans l’exercice de ses pouvoirs. Il entre dans l’école comme chez lui ; les enfans le connaissent et le respectent : c’est sa seconde famille. Dans certains pays, on pourrait s’effrayer à la vue de la grande influence exercée par l’église sur l’enseignement du peuple ; mais les mêmes causes de défiance n’existent point en Angleterre. Ici la fortune et la science obligent le vicaire, appartenant aux classes riches et instruites, se croit tenu de communiquer aux classes inférieures les bienfaits qu’il a reçus de la société. Le clergé protestant ne craint d’ailleurs point les lumière. L’expérience lui a démontré que chez un peuple indépendant l’éducation était la seule garantie contre les abus de la liberté. Aussi quels changements depuis les premières années de ce siècle, dans l’apparence des édifices consacrés à l’instruction primaire ! Jadis les fonctions d’instituteur étaient quelquefois remplies dans les campagnes par un barbier, et les armes du métier, — une longue perche terminée par un plat à barbe, — figuraient sur le devant de la boutique ou de l’école, Aujourd’hui il reste encore plus d’un vieux bâtiment de brique où se rassemblent les enfans, mais les murs intérieurs en sont blanchis à la chaux et décorés d’images, de cartes de géographie ou d’instrumens scientifiques. Par les fenêtres ouvertes et tapissées d’un rideau de feuillage entrent pendant l’été un joyeux rayon de soleil et le chant des oiseaux. On n’a rien négligé pour rendre l’instruction attrayante, car on sait bien que les institutions anglaises n’ont d’autre ennemi à craindre que l’ignorance. Ce n’est point seulement à la mère-patrie, c’est en même temps aux colonies, où se rendent chaque, année un si grand nombre d’émigrans, que s’étendent les heureux effets d’un système d’éducation auquel concourent l’état et le clergé, il y a quelques années, seize jeunes filles furent envoyées de l’école du workhouse en Australie. Toutes trouvèrent à se placer convenablement, et l’une d’elles eut même le bonheur d’épouser un homme de grande fortune. Revenue plus tard en Angleterre, elle alla rendre visite dans sa voiture à la maison des pauvres, et fit demander la maîtresse d’école. « Je vous remercie, lui dit-elle ;