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sommaires que nous venons de donner à cet égard confirment ce que nous avions dit précédemment au sujet des moteurs mécaniques destinés à la navigation aérienne. L’aviateur doit donc se faire mécanicien et s’appliquer avant tout à construire des machines qui ne pèsent que 12 kilogrammes par force de cheval. Quel succès peut-il espérer des efforts qu’il fera pour atteindre ce résultat ? Avant d’entrer dans le champ des hypothèses, où le terrain est glissant, il convient que nous restions un moment dans le domaine des faits et que nous examinions les moteurs usuels, ceux que nous voyons fonctionner dans la pratique journalière. A ce titre, nous n’avons guère à parler que des machines à vapeur, qui peuvent d’ailleurs se diviser en quatre classes : locomotives, machines navales, locomobiles, machines fixes.

C’est parmi les locomotives que nous trouvons les types les plus légers. Certaines machines anglaises fourniraient sous ce rapport des résultats fort remarquables, s’il faut croire le rapport de M. Flachat sur l’exposition universelle de 1862. Celles de la compagnie du North-Westem ne pèseraient, avec leur tender garni d’eau et de combustible pour une heure, que 85 kilogrammes par force de cheval ; mais ce chiffre semble résulter d’expériences faites dans des circonstances exceptionnellement favorables, et il ne paraît pas correspondre au travail normal des machines. On ne peut l’accepter sans faire de graves réserves. Sur les chemins de fer français, les machines les plus légères sont les locomotives à douze roues de la compagnie du Nord construites d’après les plans de M. l’ingénieur Pétiet. Elles pèsent 44 tonnes et demie quand elles sont vides, et 60 tonnes quand elles sont garnies de leur tender avec l’eau et le combustible. On peut estimer leur force à 466 chevaux[1], ce qui donne 95 kilogrammes par force de cheval, si on considère la machine vide, et 128, si on considère la machine garnie. Parmi les autres locomotives des chemins de fer français, on chercherait en vain un modèle qui, sans tender et sans approvisionnement, pesât moins de 100 kilogrammes par force de cheval.

Si nous passons aux moteurs usités dans la marine, nous trouverons

  1. Des expériences plusieurs fois répétées sur la rampe de Saint-Gobain ont permis de fixer ce chiffre. Sur cette rampe, inclinée de 18 millimètres par mètre, une machine pesant 60 tonnes remorque un train de 250 tonnes avec une vitesse de 17 kilomètres à l’heure ou de 4m,7 à la seconde. La résistance au roulement de la machine et du train pour cette vitesse, et en ayant égard aux courbes de la ligne d’expérience, doit être évaluée à 6 kilogrammes par tonne. L’effort total de traction est donc (250 + 60) (18 + 6) = 7,440 kilogrammes, et le travail par seconde 7,440 x 4,7 = 34,968 kilogrammètres. Ce travail correspond à une force de 466 chevaux, ce qui donne bien, par force de cheval disponible sur la circonférence des roues, 95 kilogrammes pour la machine vide et 128 kilogrammes pour la machine garnie.