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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/390

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donner un secours extraordinaire de 6 millions de livres, qui seront payées à raison de 100,000 francs par chaque mois jusqu’à extinction entière de la susdite somme.

« La position de votre majesté exigeant des ménagemens, elle est libre de stipuler elle-même les secours de réciprocité qu’elle estimera convenables : le mieux serait qu’elle promît de lui concerter avec moi sur le meilleur emploi à en faire dans le cas où je me trouverais engagé dans une guerre de mer. Je ne doute pas au reste, aussi longtemps que nos engagemens dureront, que votre majesté voudra bien s’engager à n’en contracter aucun qui pourrait contrarier ceux que nous formons, qu’elle n’entrera dans aucun traité défensif avec la Russie, quelque dénomination qu’on puisse lui donner, et plutôt qu’elle me communiquera confidemment toutes les ouvertures et prépositions qui pourraient lui être faites et intéresseraient notre alliance. Votre majesté peut être assurée que j’en userai de même, et que je lui ferai part de tout ce qui peut avoir rapport à sa sûreté

« Je compte sur le secret de votre majesté. Elle doit compter sur le mien, et les dispositions que je lui manifeste dans cette lettre lui garantissent la fidélité de mon intérêt et la sincérité de l’amitié avec laquelle je suis, monsieur mon frère, de votre majesté le bon frère, LOUIS. »


Dès le lendemain de la signature de ce traité secret, Gustave partait triomphant. De retour dans sa capitale le 2 août, il écrivit à Louis XVI un mois après :


« Drottningholm, 7 septembre (1784). — Monsieur mon frère et cousin, je profite du courrier qui porte la ratification de la convention de commerce pour m’entretenir librement avec votre majesté, et lui renouveler les assurances de ma tendre et inviolable amitié. Votre majesté sait déjà la promptitude avec laquelle je suis revenu chez moi, et que la distance entre Versailles et Stockholm n’est pas si grande qu’on la croit. Elle n’est qu’assez éloignée pour que l’amitié entre les deux états soit aussi éternelle que notre amitié personnelle sera constante. Cependant j’avoue que je ne puis dans ce moment penser qu’avec regret que je ne puis m’entretenir avec vous que par écrit, et qu’il n’y a qu’un mois que j’avais le plaisir de vous voir à tout moment et de pouvoir épancher mes inquiétudes et mes pensées dans votre sein ; j’ai de la peine à me voir privé de cette douce habitude et d’être obligé d’attendre des occasions, souvent bien rares ; je puis vous parler sans contrainte. J’ai exécuté en arrivant ce dont j’étais convenu avec votre majesté en annonçant au sénat en grand mystère la convention, explicatoire du traité de commerce de 1741et la cession de l’île Saint-Barthélemy faite par votre majesté en retour des avantages accordés au commerce français dans le port de Gothenbourg. J’ai ajouté que je pouvais avec bien de la satisfaction leur dire que j’avais trouvé dans les sentimens personnels de votre majesté pour moi et pour la Suède la même amitié et le même intérêt que Louis XV m’avait témoignés dans les dernières années de son règne. Cela a fait un effet très utile, et a absolument éloigné toutes les idées qu’on avait semées par des lettres particulières de