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infimes, comme par exemple du soin des appartemens, de la préparation de la nourriture. Parmi ceux qui s’occupent du négoce proprement dit, les uns conduisent les grandes opérations, font les voyages, surveillent la pêche des perles; les autres sont chargés de la vente en détail. Du reste, une hiérarchie sévèrement réglée détermine la distribution des fonctions et des rangs. Au sommet de l’association est le trésorier, qui est élu. Les Banians déploient dans les affaires une grande habileté et même beaucoup de ruse; mais leur caractère doux et inoffensif les fait aimer des indigènes. Ils observent très sévèrement leur religion dans ses moindres pratiques. L’esprit de bienveillance universelle que ce culte répand sur toute la nature vivante s’accommode parfaitement avec l’islamisme. Les musulmans voient de bon œil les Banians traiter les animaux avec les plus grands égards, et subvenir par exemple le samedi à la nourriture de tous les chiens enfans, généralement bannis des villes de l’Yémen et du Hedjaz.

On rencontre aussi sur la côte orientale de la Mer-Rouge des Arabes venus de la côte méridionale de la péninsule, d’un pays nommé Hadramout, qui, comme l’Oman, auquel il confine, n’a pas été mêlé d’une manière active aux mouvemens politiques et religieux de l’Arabie. Les habitans de ce pays passent pour grossiers, ignorans et fanatiques ils accomplissent régulièrement le pèlerinage de La Mecque, dont le grand-chérif jouit à leurs yeux d’une considération toute particulière. Les Hadramauts s’expatrient facilement pour un temps et retournent dans leur pays quand ils ont amassé de l’argent ce sont les Auvergnats de l’Arabie. Ils forment aussi des associations qui deviennent quelquefois assez puissantes, comme on l’a vu à Djeddah en 1858. Les plus pauvres sont employés comme portefaix; d’autres font le commerce ou possèdent des barques. Les Hadramauts, comme les Banians, donnent aux autres habitans de l’Arabie l’exemple de l’activité et de la persévérance, sans réussir cependant à leur inspirer en général le désir de les imiter. En somme, leur présence est utile; mais il nous reste à parler d’une autre immigration, lente, continue, insaisissable et insensible à la fois, qui pénètre dans le monde arabe et en a déjà profondément modifié la nature. Il s’agit des noirs.

Il est vrai que les montagnards et les Bédouins ont conservé de l’horreur pour les mélanges mélaniens. Ainsi dans la grande tribu des Anezi, qui occupe une partie de l’Arabie septentrionale et de la Syrie, non-seulement l’Arabe blanc n’épouse jamais une négresse, mais le nègre, même affranchi, ne saurait épouser une fille blanche. En général, le nomade, fier de son sang, méprise même l’habitant des villes et ne se soucie pas d’épouser sa fille. Mais,