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du peuple. M. Randall, surintendant de l’instruction publique pour cette ville, a pu dire avec un légitime orgueil, en rappelant ces chiffres « Nous pouvons être fiers des sacrifices que nous avons faits pour nos écoles, surtout dans les circonstances actuelles. Quelle autre nation, obligée de mettre en œuvre toutes ses forces pour défendre ses droits les plus sacrés et son existence même et de faire face aux plus lourds impôts pour maintenir sous les armes une armée considérable recrutée dans tous les rangs de la société, quelle autre nation a consacré à l’instruction du peuple des sommes aussi considérables au sein d’épreuves aussi terribles? Et quel mobile nous a déterminés à faire ces sacrifices, si ce n’est la conviction que la diffusion des lumières est indispensable au maintien des institutions libres, et que l’instruction de tous est la base de cette glorieuse constitution que nous ont léguée les hommes de la révolution? Le peuple a compris que le plus sûr moyen d’assurer le triomphe définitif de la cause à laquelle il s’est dévoué avec une résolution unanime et un cœur héroïque était de répandre encore plus l’enseignement et de travailler avec énergie à ses progrès. » Belles paroles, noble confiance dans la force de la vérité! Pour vaincre la rébellion esclavagiste, l’épée ne suffisait pas, il fallait le livre; pour déraciner l’iniquité, il fallait plus que contraindre, il fallait éclairer.

L’argent destiné à l’instruction publique provient de plusieurs sources différentes. Il y a d’abord ce que l’on appelle le fonds des écoles (school-fund). Les Américains ont conservé cette tradition ancienne qui fait considérer un service public comme une personne civile ayant besoin pour subsister d’une dotation dont le revenu est employé à la faire vivre. C’est ainsi que se perpétuent généralement en Europe les fondations de charité qui remontent au moyen âge, les hospices et les bureaux de bienfaisance; c’est ainsi également que s’entretenaient et que s’entretiennent encore les églises établies là où elles ont survécu. En Amérique, au lieu de constituer un fonds pour soulager les pauvres, on a établi des ressources certaines pour développer l’instruction, qui prévient le paupérisme. On fonde une chaire dans une école plutôt qu’un lit à l’hôpital, et l’on fait plus de legs pour répandre des connaissances que pour distribuer des aumônes.

Le fonds de l’instruction publique provient soit d’une dotation primitive de l’état, soit de la vente des terres publiques. Le congrès, renonçant sur ce point à ses habitudes d’abstention, a décidé qu’un trente-sixième des terres serait affecté au fonds des écoles. Dans les états de l’ouest, où l’arpenteur peut tracer dans la prairie sans limites ces lignes se coupant à angle droit chères à l’esprit