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concourir avec lui au règlement des questions qui intéressaient plusieurs tribus voisines, et tous, c’est-à-dire probablement tous les hommes libres, décidaient en commun de la guerre. Tous également étaient appelés à répartir les deux tributs appelés « tribut de la nourriture pour le roi » et « tribut de la nourriture pour le chef. ». Ces noms de « tribut de la nourriture » peuvent cacher de véritables impôts en nature. On a la répartition de cet impôt par provinces au VIIIe siècle, et le Senchus nous apprend qu’au v% lorsque le chef meurt avant d’avoir touché le tribut, son héritier a le droit de réclamer l’arriéré. À ces deux charges s’en ajoutaient plusieurs autres qui montrent un certain degré de civilisation : la construction des ponts en pierre et en bois, l’entretien des champs de foire, l’entretien des routes. Les routes étaient divisés en trois classes, et les routes de première classe s’appelaient routes royales. On devait les mettre en état trois fois par an : pendant l’hiver, au temps des, foires, à l’époque des courses de chevaux. Puis venait toute une série de travaux communs : le labourage des champs communs, la garde des bestiaux communs, l’entretien du moulin commun, et le soin des pêcheries et des filets communs. Tous ces travaux, aussi bien que la construction et le ravitaillement des forts, étaient surveillés par les chefs, et le frère seul avait alors le droit d’accomplir la tâche du frère ; mais, dans un état de choses où la guerre était la première des occupations et la rapine la seule source de fortune, les obligations militaires devaient être les plus strictes de toutes. Quiconque possédait un héritage devait suivre le roi aux trois guerres annuelles et venir le joindre chaque fois qu’il en était requis. Celui qui possédait un bouclier et savait s’en servir était tenu de prendre part à toutes les expéditions de pillage, et le reste du peuple devait être prêt tous les jours à repousser les attaques des pirates, ainsi que les incursions des tribus voisines, et tous les sept jours, en cas de paix, à faire la chasse aux loups. L’ordre et l’autorité n’étaient pas sans garanties, comme on dirait en France. L’amende la plus forte est infligée à celui qui trouble la réunion des chefs en excitant du tumulte. Celui qui, pendant que les chefs sont à conférer ou à festoyer, coupe les brides des chevaux et les fait échapper doit, comme réparation, payer le montant de la valeur des dommages d’honneur appartenant aux trois plus nobles personnages de la réunion ou aux sept plus nobles, suivant l’opinion d’une femme brehon du IIe siècle. Enfin celui qui mine le tertre de gazon appelé lieu d’assemblée doit remplir de lait le trou qu’il a fait. Le chef dépossédé, s’il est de seconde classe, — car le même privilège ne s’applique pas au roi, — peut, pour se consoler, se donner le plaisir, probablement dangereux, de saisir les bestiaux