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tient pas à 200 millions de plus ou de moins dans la caisse de la Banque ; elle tient à ce qu’on a dépassé les ressources du capital disponible, que par suite ce capital est devenu cher, et la cherté de l’argent n’est que la manifestation, que le symptôme de la cherté du capital.

Maintenant qu’est-ce que peuvent représenter en capital les 200 millions de moins en numéraire ? Ils doivent représenter une part proportionnelle à ce qu’est le stock métallique tout entier vis-à-vis du fonds de roulement de la société, puisque ce fonds ne circule qu’au moyen du numéraire. Si le fonds de roulement est de 50 milliards et que le stock métallique soit de 5 milliards, une différence en moins de 200 millions en numéraire en représente une de 2 milliards en capital, elle en représente une beaucoup plus forte, car cette différence de 200 millions en numéraire, elle se manifeste dans les caisses de la Banque de France, c’est-à-dire là où le numéraire a son rôle le plus actif et le plus parfait. Or si en Angleterre on liquide des sommes considérables au moyen de viremens, et sans employer même de monnaie métallique, nous admettrons bien que, chez nous, 200 millions de moins en numéraire à la Banque représentent certainement un capital circulant de 5 à 6 milliards. C’est à peu près le déficit que nous avons constaté dans la première partie de ces études, en comparant le capital disponible avec les emplois qui en ont été faits depuis dix ans. On s’explique parfaitement qu’un pareil déficit agisse sur les rapports de l’offre et de la demande, qu’il détermine des besoins pressans et fasse renchérir le capital ; mais on ne s’expliquerait pas qu’avec 200 millions de numéraire de plus on pût changer cette situation. On s’en servirait tout simplement, en supposant qu’ils tombassent du ciel, pour se procurer une très faible partie des choses qui manquent, et le déficit, au lieu d’être de 5 milliards, ne serait plus que de 4 milliards 600 millions. Je le répète, on voit par ces chiffres combien est puérile l’argumentation de ceux qui s’attachent à ces 200 millions de numéraire comme au seul moyen de nous tirer d’embarras dans les momens de crise.

Il est complètement insignifiant, pour les facilités à donner au crédit, que le capital de la Banque de France soit employé ou non en valeurs publiques. En temps ordinaire, la Banque a tous les capitaux dont elle a besoin ; elle en a même plus qu’il ne lui en faut, témoin ce qui a eu lieu dans la plus grande partie de cette année. Et en temps de crise 150 ou 200 millions de plus ne seraient, je le répète, qu’une goutte d’eau dans un fleuve, et ne retarderaient pas, ne devraient pas retarder au moins le recours aux mesures restrictives. Laissons donc les choses comme elles sont. Le capital