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notre politique, si intéressée au maintien des bons rapports avec les États-Unis, à l’abri de tout péril de conflit. La France est mal renseignée sur les dispositions du gouvernement des États-Unis ; la plupart du temps, nos journaux gardent le silence, et la presse étrangère nous transmet souvent des informations contradictoires. Un jour on nous dit que le gouvernement des États-Unis ordonne le maintien de la plus stricte neutralité sur la frontière mexicaine ; un autre jour, on nous apprend que le président Johnson envoie une légation auprès du chef de la république mexicaine. On avait parlé d’une dépêche de M. Seward à propos d’un projet de recrutement en Égypte du corps de nègres que nous avait fourni le vice-roi ; des journaux ont nié l’existence de cette dépêche : réfutant naguère ces démentis, un correspondant du Times, écrivant de Washington, racontait la dépêche comme si le ministreaméricainla.lui eût donnée à lire. Le dernier steamer a apporté des propos graves du général Grant. Nous le répétons, à ces bruits contradictoires et confus il importe de faire succéder le plus tôt possible des explications amicales et nettes qui apprennent au public la marche que veulent suivre les gouvernemens de France et des États-Unis. La coïncidence de la session du congrès et de celle de notre corps législatif nous paraît indiquer l’opportunité des informations catégoriques après lesquelles nous soupirons.

Il y a eu des temps où la publication d’un livre a pu être en France un grand événement. Nous ne vivons plus à une de ces époques généreuses où l’intelligence publique s’associait à ces nobles fêtes de l’esprit ; sinon, nous signalerions comme un événement d’une haute Importance l’apparition du beau livre de M. Edgar Quinet sur la révolution. Nous ne souscrivons sans doute point à tous les jugemens portés par M. Quinet sur les choses, les idées et les hommes de notre grande ère ; mais nous déclarons qu’il est impossible de lire cet ouvrage sans une sympathie et une admiration profondes.

M. Quinet a tout donné à cette pieuse et virile étude de la révolution française, la droiture de la conscience, le plus scrupuleux examen, la méditation la plus patiente et la plus concentrée, une volonté et une puissance égales d’intuition ; puis, et c’est encore un témoignage souverain de son culte pour la révolution et pour la patrie, il a paré son œuvre avec amour du plus pur et du plus éloquent français qu’il ait jamais lui-même parlé. Un grand nombre d’amis de la révolution française ont eu le travers de s’éparpiller en petites sectes orgueilleuses, farouches, intolérantes, qui, comme autant de petites églises, ont perpétué les vieux dissentimens des hommes de 1789, 1792 et 1793. Il y a des orthodoxes des doctrines républicaines qui sacrifient les principes et les intérêts de la liberté à de puériles antipathies. On a vu récemment, à propos des projets de décentralisation publiés par le comité de Nancy, une de ces manifestations