sous le régime turc, dans ce tableau que fait d’eux et de leur montagnes l’historien Marmol au XVIe siècle[1]. « Sur la frontière des plaines d’Alger qu’on nomme Meticha (la Mitidja), du costé du midi et du levant, sont plusieurs montagnes peuplées d’Azuagues[2], gens belliqueux qui vivent la plupart du temps sans reconnaître aucun seigneur ni payer tribut à personne. Ils ont guerre perpétuelle entre eux ; mais ils ont de certaines foires libres pour le commerce où ils s’entre-communiquent sans crainte. Entre ces montagnes, qui sortent toutes du Grand-Atlas, il y en a une qu’on appelle Cuco, du nom d’une ville qui y est située[3]. Cette montagne est fort haute et escarpée à dix-huit lieues d’Alger entre le levant et le midi, à quinze de Bugie du costé du couchant et à quatre de la montagne de La Abès (des Aït-Abès), dont elle n’est séparée que par la rivière de Bugie. On y trouve plusieurs vergers qui portent toute sorte de fruits et d’où l’on tire quantité d’huile. Entre ces barbares sont plusieurs faiseurs de poudre, parce qu’ils ont des mines de salpêtre ; ils ont aussi de bons ouvriers qui font des épées, des poignards et des fers de lances… Ce ne sont de tous costés, dans la province de Bugie, que montagnes escarpées où habitent des Azuagues fort vaillans. Ces montagnes sont si sauvages et d’une avenue si difficile que la plupart des peuples s’y maintiennent en liberté, sans se soucier de la puissance des rois… La rivière de Bugie passe sur la pente de la montagne, dont les habitans se vantent d’être chrétiens d’origine et sont fort ennemis des Arabes. D’ailleurs, par un ancien usage, ils se font une croix bleue à la joue ou à la main sans autre raison, à ce qu’ils croient, que de marquer leur origine. »
Sous la période arabe, ce sont encore bien nos montagnards djurdjuriens que ces Zouaouas cités par Ibn-Khaldoun comme ayant d’ancienne date « tenu un rang très distingué en temps de guerre aussi bien que dans les intervalles de paix. Leur territoire est situé, dit-il, dans la province de Bougie. Ils habitent au milieu de précipices formés par des montagnes tellement élevées que la vue en est éblouie, et tellement boisées qu’un voyageur ne saurait y trouver son chemin. Ainsi les Beni-Fraoucen et les Beni-Iraten occupent le massif qui est situé entre Bougie et Dellys. C’est une de leurs retraites les plus difficiles à aborder et les plus faciles à défendre. De là ils bravent la puissance du gouvernement, et
- ↑ L’Afrique, de Marmol, traduite de l’espagnol par Nicolas Perrot, sieur d’Ablancourt.
- ↑ Un Zouaoua s’appelle rigoureusement en langage kabyle un Ag-Aoua ; le nom d’Azuagne est un mélange évident des deux mots Zouaoua et Ag-Aoua, qui sont synonymes.
- ↑ C’est aujourd’hui un village des Aït-Yaia, voisins des Aït-Iraten.