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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 61.djvu/15

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qui avait écarté les concurrences en améliorant, pour elles comme pour le public, les conditions de l’exploitation, n’obtiendraient point le crédit nécessaire pour mener à bonne fin l’œuvre vraiment gigantesque de l’achèvement du réseau. D’un autre côté, le fardeau qui menaçait d’écraser les compagnies n’aurait pas été davantage supporté par le trésor. Ce que ni les compagnies ni l’état n’auraient pu faire isolément, on le tenta en combinant leurs forces et leur crédit par le système de la garantie d’intérêt, système qui avait été partiellement essayé au début des chemins de fer, et qui fut généralement appliqué en vertu des conventions de 1859, révisées et complétées en 1863. D’après ce mode, l’état a garanti aux compagnies l’amortissement et un minimum d’intérêt pendant cinquante ans pour le capital destiné à l’établissement des lignes comprises dans le nouveau réseau, et pour prix de cette garantie il a pu tout à la fois hâter la construction des lignes décrétées antérieurement, rendre définitives des concessions qui n’avaient d’abord qu’un caractère éventuel, et prescrire l’exécution de chemins de fer nouveaux dans des régions qui, selon toute apparence, auraient attendu indéfiniment le passage d’une locomotive sur des rails. Grâce à ces mesures, l’ensemble des concessions comprend aujourd’hui 21,060 kilomètres, et il y a en exploitation 13,084 kilomètres, c’est-à-dire que depuis 1857 le réseau concéda s’est agrandi de 5,000 kilomètres, et le réseau exploité de près de 6,000. Si l’on tient compte des crises qui durant cette période ont à diverses reprises frappé le crédit, on doit reconnaître que ce résultat est très considérable. Il a été dépensé jusqu’ici une somme de 6 milliards 1/2, à laquelle l’état a contribué pour 970 millions seulement, le surplus ayant été fourni par les compagnies, et il reste à dépenser, pour l’exécution des lignes présentement concédées, 2 milliards 600 millions, soit 470 millions par l’état et 2 milliards 130 millions par les compagnies. En résumé donc, dans la dépense totale de 9 milliards 100 millions que coûteront les 21,060 kilomètres formant le réseau actuel, l’état n’aura eu à payer directement que 1 milliard 440 millions ; si l’on estime à 400 millions le capital qui représente la garantie d’intérêt stipulée par les conventions de 1859 et de 1863, on voit que la contribution de l’état pour l’établissement du réseau n’atteindra pas 1,900 millions, tandis que les compagnies auront dépensé plus de 7 milliards.

Il suffit d’énoncer cette somme de milliards pour montrer que l’état n’aurait pu sans péril l’ajouter au capital de la dette publique, et qu’il a sagement fait de livrer à l’industrie privée l’exécution du réseau. Il résulte également de l’exposé qui précède que les mesures successivement prises à l’égard des compagnies, — subventions directes, prolongation des concessions, suppression des