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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 61.djvu/434

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L’amiral Belcher exprime aussi la crainte que les capitaines Osborn et Richards ne rencontrent une mer moitié libre, moitié gelée, et ne se heurtent contre les mêmes difficultés qui ont fait échouer la tentative de Parry sur la banquise du Spitzberg. James Ross, l’amiral Wrangel et lui-même savent par expérience qu’il n’est point de mode de locomotion plus lent et plus pénible. En essayant de pénétrer par les mers du Spitzberg, un navire peut, s’il ne réussit pas, revenir en Angleterre dans le cours de la même année. Scoresby, qui se trouvait à la fin de mai par 81° 30’ dans une mer libre de glaces vers l’orient, serait probablement parvenu à atteindre le pôle. Telle est du moins la conviction personnelle de l’amiral Belcher.

L’amiral Ommaney parle dans le même sens que l’amiral Belcher ; il partage son avis, précisément parce qu’il a commandé des expéditions dans l’Amérique boréale. Un grand nombre de navires à voiles ou à vapeur sont déjà arrêtés par les glaces dans la baie de Melville, sur les côtes du Groenland, par 76° de latitude, et l’on n’est jamais sûr d’atteindre le détroit de Smith, où Kane en 1853 et Hayes en 1861 n’arrivèrent qu’avec beaucoup de peine. Le premier y laissa son navire et revint dans ses embarcations. Par le Spitzberg au contraire, on parvient aisément et rapidement au 80e degré, et dans le nord-est de l’île la mer doit être libre soit au printemps, soit en automne. L’amiral Ommaney se rallie donc à l’opinion de Parry, de Scoresby, de Sabine et de Belcher, pour affirmer que les chances les plus favorables se rencontrent sur les côtes orientales du Spitzberg.

Le capitaine Inglefield se prononce également en faveur du Spitzberg pour les motifs suivans : puisqu’on cherche la route la plus courte et la plus sûre, il faut se rappeler que par la baie de Baffin il y a 4,000 milles marins de Londres au pôle, par le Spitzberg 2,500 seulement. Ceux qui ont navigué dans la mer de Baffin savent combien il est difficile de dépasser les glaces flottantes de la baie de Melville. Trois fois le capitaine Inglefield a soutenu personnellement cette lutte, et il sait par expérience combien elle est longue et pénible. Plusieurs navires ont au contraire atteint sans peine 81 et 82 degrés au nord du Spitzberg et ont vu la mer libre autour d’eux et dans la direction du nord. Le chef dont l’hydrographie déplore la perte récente, sir Francis Beaufort, considérait aussi la nier située entre la Nouvelle-Zemble et le Spitzberg comme l’ouverture par laquelle on pourrait un jour peut-être atteindre le but désiré.

Le capitaine Davis, qui a accompagné sir James Ross au pôle sud, se déclare également pour le Spitzberg par des motifs tirés de la proximité des ressources dont l’île abonde et de la probabilité