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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 61.djvu/433

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aux matelots on aurait le choix parmi les nombreux volontaires qui se présenteraient avec empressement au premier appel de l’autorité.

M. John Lubbock, président de la Société ethnographique, fit ressortir l’intérêt qui s’attache à l’étude des Esquimaux, dont la civilisation rudimentaire doit se rapprocher de celle des villages lacustres de la Suisse, des habitans des cavernes du Périgord ou des anciennes populations littorales du Danemark. Le capitaine Hamilton, M. Marckham et lord Dufferin, tous trois familiers avec les régions boréales, appuyèrent de toutes leurs forces la proposition du capitaine Osborn, et le Dr Bonnet, qui était attaché à l’expédition du capitaine Austin en 1850 et 1851, rapporte qu’en vingt mois on ne perdit qu’un seul homme, mort de froid, sur un total de cent quatre-vingts, qui revinrent bien portans. À la fin de la séance, le capitaine Osborn prit de nouveau la parole pour rendre hommage à la mémoire de sir Francis Beaufort, hydrographe en chef de la marine, qui lui avait tendu la main au début de sa carrière et lui avait inspiré le goût des voyages de découvertes. Lorsqu’on était à la recherche de Franklin, l’amiral Beaufort lui disait : « Jeune homme, ne vous découragez pas ; que des savans tels que Murchison et Sabine unis à l’héroïque lady Franklin soulèvent l’opinion publique, et l’amirauté cédera à sa pression. » C’est ce qui est arrivé ; et les traces de Franklin ont été retrouvées, et la géographie des régions arctiques a été complétée par ceux-là mêmes qui suivaient les vestiges de ses pas dans ces parages inconnus.

La profonde conviction et la compétence bien connue du capitaine Osborn avaient enlevé les suffrages de l’assemblée. Un peu plus tard cependant des doutes s’élevèrent. Le docteur Petermann, dans une lettre adressée au président sir Roderick Murchison, fit valoir les argumens que nous avons reproduits plus haut en faveur d’une tentative par les côtes orientales du Spitzberg, et dans la séance du 27 mars 1863 beaucoup de membres, sans repousser le plan proposé par le capitaine Osborn, se déclarèrent en faveur de celui du géographe allemand. L’amiral sir George Back ne fut pas de ce nombre : il avait servi en 1818, sous les ordres de Franklin, dans l’expédition du Trent et de la Dorothea. Les navires suivirent la banquise qui s’étend du Spitzberg au Groënland, et telle en est la continuité que l’amiral ne croit pas à la possibilité de dépasser, entre ces méridiens, le 82e parallèle atteint par Scoresby. Eux-mêmes furent arrêtés par 80° 30’. « Quant au régime des glaces sur la côte orientale du Spitzberg, ajoute l’amiral, il est peu connu ; il faut l’étudier, et en attendant on ne voit pas de raison pour qu’une expédition en traîneaux, bien équipée, ne puisse atteindre le pôle en partant du détroit de Smith. »