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de Bourgogne et autres pièces déclarées par le traité de paix que j’ai maintenant juré et signé, et pareillement en cas que les ratifications et autres seuretés mentionnées audit traité ne fussent délivrées dedans quatre mois, je retournerai au pouvoir de l’empereur et viendrai incontinent, passé ledit temps, par devers lui, quelque part qu’il soit, et me rendrai son prisonnier de guerre, comme suis de présent, pour tenir prison là où il plaira audit empereur me ordonner, tant et si longuement que le contenu audit traité soit entièrement fourni et accompli[1]. »

Le secrétaire d’état Lallemand, comme notaire impérial, dressa acte de cette déclaration, faite de gentilhomme à gentilhomme. Charles-Quint devait être aussi satisfait que François Ier était obligé de le paraître. Il était arrivé à ses fins. Il avait arraché à son prisonnier ce que son prisonnier avait soutenu être impossible à l’égard de son royaume et contraire à son honneur. L’exécution de ce traité, qui devait commencer par la délivrance du roi, à laquelle s’était longtemps refusé l’empereur, et qui devait se poursuivre par la restitution de la Bourgogne, que le roi avait si souvent repoussée, François Ier semblait craindre qu’elle ne fût différée, et Charles-Quint qu’elle ne fût pas accomplie. Ils ne négligèrent l’un envers l’autre aucune des démonstrations propres à se rassurer mutuellement. François Ier écrivit à Charles-Quint pour lui exprimer sa satisfaction du traité conclu, demander à le voir et rendre par là sa délivrance plus prompte. Charles-Quint lui répondit en se réjouissant d’une paix qu’il avait tant souhaitée, et dont il avait, disait-il, un merveilleux plaisir à cause du bien qui en résulterait, s’ils l’observaient fidèlement, « comme, ajoutait-il, ne fais doute que vous de votre côté et moi du mien ferons[2]. » Il témoignait le même désir de voir le roi qu’avait exprimé le roi de se trouver avec lui, et il annonçait amicalement qu’il y satisferait dès qu’il aurait dépêché tout ce qui concernait les affaires dépendantes de la paix conclue[3]. La lettre de Charles-Quint à la régenté de France, pour se concilier la bonne volonté et l’efficace influence de la mère du roi par les témoignages d’une extrême confiance et d’une vive tendresse, était non moins habile qu’affectueuse. Il lui donnait alors adroitement le titre de mère qu’il lui avait donné autrefois, et qu’elle avait réclamé sans l’obtenir après la bataille de Pavie. « Puisque j’ai recouvré dans le roi votre fils un bon frère, disait-il, et que je vous baille la reine ma sœur pour fille, il m’a semblé que je devais reprendre le nom dont autrefois j’avais usé et vous

  1. Collection, etc. — Sandoval en parle aussi, t. Ier, liv. XIV, § 4.
  2. Lettre de Charles-Quint, dans Lanz, t. Ier, p. 190.
  3. Captivité de François Ier, p. 483.