pour amener les états moyens à lui céder le commandement de leurs troupes et le soin de les représenter vis-à-vis de l’étranger. On verrait s’organiser pour l’état militaire et la diplomatie de l’Allemagne quelque chose de semblable à ce que l’union douanière a fait pour l’industrie et le commerce. L’Autriche serait peu à peu éconduite de la confédération, et l’hégémonie prussienne serait fondée. Nous trouvons naturel que la cour de Vienne aime mieux tout risquer que de se condamner à une pareille déchéance. Pour ce qui concerne la France, nous ne pouvons nous empêcher d’admirer la naïveté de ceux qui croient que ses intérêts ne sont point engagés dans des événemens qui pourraient tendre à réunir dans les mains de la Prusse toutes les forces de l’Allemagne. Un effacement pareil serait bien nouveau dans notre histoire. Les ombres de Richelieu, de Mazarin, de Louis XIV, de Napoléon, tressailleraient, si elles en avaient le spectacle. Les calculs de ceux qui s’imagineraient que la France pourrait sans déplaisir voir éclater la guerre en Allemagne dans l’espoir que les accidens de la lutte lui apporteraient des occasions favorables de s’agrandir ne nous paraîtraient pas moins chimériques et dangereux. C’est une spéculation sotte, qui n’est plus de notre âge, de croire qu’un peuple a quelque chose à gagner aux guerres qui peuvent déchirer des nations voisines ou rivales. Si cette guerre dont le mauvais rêve nous obsède depuis quelques jours devenait malheureusement une réalité, qui pourrait en prévoir les développemens, les vicissitudes, les péripéties ? Que d’incidens pourraient éclater, qui nous susciteraient des embarras malencontreux ou nous imposeraient des engagemens pénibles ! L’Italie résisterait-elle à une occasion qui lui donnerait l’espoir de s’affranchir réellement cette fois depuis les Alpes jusqu’à l’Adriatique ? Qu’arriverait-il parmi les populations danubiennes, dans la Turquie d’Europe ? Que ferait la Russie ? Et l’explosion finale de la question d’Orient ne serait-elle pas bien proche ? Les peuples allemands sont une race douée d’éminentes qualités militaires ; ils ont vécu pacifiquement depuis un demi-siècle ; nous ne saurions avoir aucun intérêt à leur voir reprendre le goût des armes et s’abandonner aux instincts et aux entraînemens qu’excitent les émotions et les gloires de la guerre. Nous avons eu dans la grande guerre civile des États-Unis la récente expérience du peu de profit que les nations ont à retirer des déchiremens intérieurs d’un grand peuple. Les Américains et même les anciens rebelles avouent aujourd’hui que la guerre civile n’eût pas duré six mois, si les droits de belligérant n’avaient pas été reconnus à la confédération du sud par l’Angleterre et par la France, Si l’Angleterre et la France n’avaient consulté que l’intérêt de l’humanité, si elles s’étaient hâtées de décourager une révolte entreprise pour perpétuer l’esclavage, elles eussent prévenu peut-être ou atténué les souffrances qu’elles ont ressenties dans leur industrie. De faux politiques crurent en ce temps-là en Angleterre et même chez nous que la guerre civile entraînerait la dissolution des États-Unis,
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