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nématoïdes d’envahir les animaux et les organes auxquels ils sont subordonnés.

Les nématoïdes pondent un grand nombre d’œufs, qui sont généralement expulsés des organes au moyen des fonctions mêmes de ces organes. On le conçoit sans autre explication pour le tube digestif, pour le foie, pour le rein, dont les produits sont expulsés au dehors. Les voies respiratoires sont fréquemment habitées par des vers dont les œufs sont expulsés par les mouvemens des cils vibratiles qui recouvrent ces organes, et dont la fonction est de balayer toutes les poussières que la respiration y apporte. Lorsque les vers habitent dans la profondeur d’organes sans communication avec le dehors, la femelle pratique elle-même la voie par où doivent sortir ses œufs ; mais il faut ensuite que les œufs ou les embryons rentrent dans les organes où ils ont pris naissance pour y acquérir un développement complet et reproduire à leur tour. Ils le font de deux manières, l’une passive, l’autre active : s’il s’agit d’organes qui sont en communication avec l’extérieur, telles que les voies digestives ; le mode est purement passif ; c’est avec la boisson ou avec les alimens qu’ils reviennent. Pour qu’ils puissent le faire chez l’homme, chez les ruminans, chez les carnassiers, la nature a usé de l’expédient suivant : l’embryon renfermé dans la coque de l’œuf peut vivre d’une sorte de vie latente pendant un temps très considérable. Il attend ainsi le moment où, parvenu dans un milieu propice au développement du ver, il se revivifie et sort de sa coquille ; j’ai fait éclore des œufs du lombric de l’homme après les avoir conservés dans l’eau pendant six ans. On conçoit qu’à la faveur d’une aussi longue vie latente, la transmission des nématoïdes d’un homme à un autre, d’un animal à un autre animal, soit possible, car en six ans les œufs déposés à la surface du sol sont entraînés par les pluies dans des mares, dans des ruisseaux, dans des sources où ils séjournent jusqu’à ce qu’ils soient transportés dans les boissons dont fait usage l’homme ou l’animal chez lequel le ver peut se développer.

Sans doute tous les animaux ne boivent pas, il en est qui ne se repaissent que d’une proie vivante ou d’alimens secs. La transmission ne devient pas impossible pour cela ; elle a lieu de mille façons, souvent très curieuses. Les souris, par exemple, avalent les œufs de leurs parasites, mêlés à la poussière qui entoure leur résidence, quand elles lustrent leurs poils avec la langue. Ces exemples suffisent pour faire comprendre la possibilité de la transmission que nous avons nommée passive. Le second mode de transmission des vers est actif ; il intervient lorsque le séjour du parasite est un organe sans communication avec l’extérieur. C’est alors la larve ou l’embryon, ce n’est plus l’œuf, qui devient l’agent de la propagation. La période de larve, on le sait, est une phase de la vie dans laquelle les organes génitaux ne sont point encore développés : la larve du papillon est la chenille, celle du cousin est un petit ver aquatique, celle de la grenouille est le têtard. Le milieu où vit la larve diffère souvent de celui où vit l’adulte. La même condition se rencontre chez beaucoup de vers nématoïdes pour lesquels chacune de ces deux périodes se passe nécessairement dans un séjour différent. Si l’on a cru longtemps qu’un ver nématoïde ne peut par