port que la paix et l’industrie avaient créés pour d’autres fins, ils ont su pousser leur armée en avant et paraître sur tous les champs de bataille avec l’avantage du nombre. Au reste, on ne peut manquer d’être bientôt éclairé sur ces questions, non-seulement par le récit des impressions personnelles, mais aussi par les enquêtes et les instructions judiciaires qui paraissent devoir être instituées en Autriche. Le gouvernement de l’empereur François-Joseph, d’accord sans doute sur ce point avec l’exaspération du sentiment populaire, ne se refuse pas la suprême, mais peu généreuse et toujours stérile consolation des vaincus. Il faut des victimes expiatoires pour dégager la responsabilité des uns et pour venger l’orgueil des autres. Un certain nombre de généraux et d’officiers seraient, dit-on, traduits devant des conseils de guerre. La liste des noms qui ont été prononcés est déjà beaucoup trop longue, et nous espérons qu’elle est exagérée. Bien des gouvernemens ont provoqué ou se sont laissé imposer, dans la colère de la défaite, de pareils sacrifices ; en est-il beaucoup qui ne les aient pas regrettés, beaucoup qui aient vu confirmer par l’histoire les jugemens qu’ils avaient fait rendre dans les accès de leur désespoir et de leur faiblesse ? Le supplice de l’amiral Byng n’est-il pas une des taches de l’histoire de l’Angleterre ? La république française envoyait à l’échafaud les généraux malheureux, n’est-ce pas une de ses hontes ? et cette barbarie lui fut-elle même jamais d’aucun profit ? Après Solferino, le cabinet de Vienne fit aussi ce que, dans les jours de malheur, on appelle des exemples ; son armée en a-t-elle été fortifiée ? Après la campagne de 1866 va-t-on recommencer ? Lorsque dans le nombre des morts et des blessés on signale une si forte proportion d’archiducs, de généraux, d’officiers, osera-t-on, parmi tous ces braves trahis par la fortune et non par leur courage, aller chercher des coupables, et s’il est des coupables, n’est-ce pas ailleurs peut-être qu’ils se trouvent ? Instruite par l’infortune, la cour de Vienne ne devrait pas oublier que de tous les traits de la grandeur des Romains il n’en est peut-être pas de plus célèbre, ni qui ait été plus admiré que la conduite du sénat lorsque, après la bataille de Cannes, au moment d’un danger suprême pour la république, il se porta en corps au-devant de Varron, et le remercia de n’avoir pas désespéré de la patrie.
Tandis qu’ils faisaient ou devaient faire de grands efforts pour assurer l’égalité et peut-être même la supériorité numérique à leur armée du nord, les Autrichiens ne faisaient rien de semblable sur leur frontière du sud. Presque tous les témoignages s’accordent pour constater que l’armée sous les ordres de l’archiduc Albrecht, le fils du célèbre archiduc Charles, ne s’élevait pas au chiffre de