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Louis-Philippe qui déclara à l’Université une guerre de citations qui produisit un si fâcheux scandale. Chose curieuse, c’était alors dans les livres de M. Cousin et de ses disciples que le cléricalisme allait chercher le prétexte de ses imprécations accusatrices, — et aujourd’hui M. Dupanloup est bien obligé de puiser dans les mêmes ouvrages du maître illustre les témoignages les plus autorisés en faveur du spiritualisme. L’évêque d’Orléans aborde en finissant l’objection qu’on est en droit de lui adresser. Il a voulu effrayer au profit de la question romaine! Il n’en disconvient point tout à fait; dans la guerre au pape, dit-il, il a voulu démasquer la guerre à Dieu! Il n’y a plus d’utilité à répondre aux déclamations de M. Dupanloup sur la question romaine. L’écrivain épiscopal entrevoit pourtant dans sa péroraison l’horizon vers lequel devraient se porter désormais tous les regards et toutes les aspirations des catholiques : la perspective de la liberté de l’église remplaçant l’illusion de l’alliance de la cour de Rome avec le pouvoir politique. « Vous nous répétez chaque jour, s’écrie-t-il, que si l’église n’a plus le pouvoir temporel, elle aura, ce qui vaut mieux, la liberté! Nous prenons acte de votre parole. » Mais les faits, déclare M. Dupanloup, démentent ici les paroles. « Les vrais libéraux de l’Europe, continue-t-il, ceux qui nous tiendraient sincèrement ce langage sont d’ailleurs ici dans la même situation que les vrais chrétiens; ils sont battus et sans aucun pouvoir de tenir leurs promesses. » M. Dupanloup ne montre point dans cette appréciation des choses une clairvoyance libérale. Lui, pontife catholique, il ne devrait point douter que, si la liberté est nécessaire à l’église dépouillée du pouvoir temporel, l’église aura assez de vertu et de force pour conquérir la liberté; quant aux libéraux, ils sont convaincus que la transformation du pouvoir temporel affranchira l’église et dépouillera le despotisme dans les pays catholiques d’un concours qu’il avait toujours trouvé dans la combinaison politique et religieuse qui dominait à Rome. La rupture de cette solidarité odieuse qui unissait l’autorité religieuse aux despotismes politiques sera une première et large satisfaction donnée au libéralisme. Une telle victoire est la promesse infaillible des autres conquêtes.

Quelque pénible que soit le dénoûment de notre entreprise mexicaine, c’est pourtant un dénoûment, et à ce titre il doit nous consoler des circonstances qui l’accompagnent. L’empereur Maximilien n’a point encore fait connaître sa décision. Elle est cependant certaine. L’empereur Maximilien ne peut point rester au Mexique après nous; il ne saurait avoir la pensée d’affronter l’insurrection républicaine, visiblement appuyée par un patronage américain. Les préparatifs d’embarquement de Maximilien sont avancés; il ne peut tarder à suivre ses bagages. Son irrésolution apparente est un dernier accès de mélancolie ou un effort suprême de dignité. Nous n’avons point d’ailleurs le droit d’être sévères envers ce prince, à qui la confiance placée par lui dans une entreprise où il s’associait à nous non--