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de réfrangibilité différente ; il laisse les rayons rouges plus condensés, il donne plus d’étendue au contraire à la partie violette. On peut par d’autres moyens obtenir un spectre où les rayons différens conservent mieux leur valeur relative. La nature du prisme change aussi les rapports entre les rayons lumineux, calorifiques et chimiques. Si l’on reçoit de la lumière solaire sur un prisme d’eau, le maximum de chaleur apparaît dans le jaune ; — sur un prisme de verre commun, dans le rouge ; — sur un prisme de flint-glass, au-delà du rouge ; — sur un prisme de sel gemme, bien au-delà du rouge, dans la partie tout à fait obscure. Il y aurait également à tenir compte de la nature de la source lumineuse ; mais laissons ces détails, nous voulions seulement montrer comment dans toute émission lumineuse on trouve, à côté de l’action lumineuse proprement dite, l’action calorifique et l’action chimique. Nous parvenons à diviser ces trois actions, mais non sans peine, tant elles nous apparaissent confondues. N’oublions donc pas cette synthèse toute faite qui se présente à nous dès l’abord. Si après avoir étudié isolément la lumière, la chaleur, l’affinité, nous venons à retrouver la loi qui unit ces phénomènes, rappelons-nous que nous les ayons rencontrés réunis, et que c’est nous-mêmes qui les avons séparés pour les. mieux examiner. Pour le moment, il nous faut continuer notre analyse, laisser de côté la chaleur ainsi que l’action chimique et ne nous occuper que de la lumière.

Qu’est-ce que la lumière ? Ce sujet a donné carrière à l’imagination des vieux physiciens. Les uns plaçaient dans l’œil une force visuelle, cette force projetait des rayons qui allaient toucher les objets. Les autres supposaient au contraire que les objets émettaient tout autour d’eux un nombre infini de petites images qui entraient dans les yeux des hommes et des animaux. On ne put guère se demander sérieusement ce qu’était la lumière que lorsqu’on connut la structure de l’œil, et qu’on vit l’image des objets formée sur la rétine comme sur le fond d’une chambre obscure. La rétine ainsi impressionnée transmet la sensation au nerf optique ; mais comment la rétine est-elle impressionnée ? comment l’image s’y forme-t-elle ?

Newton supposa que les corps lumineux lancent de petits corpuscules dont le choc émeut la rétine. C’est la fameuse théorie de l’émission qui donna lieu pendant la fin du XVIIe siècle à de si chaudes controverses. Newton avait établi, en se servant de son hypothèse, les lois principales de l’optique, celles de la réflexion, celles de la réfraction. Cependant des difficultés subsistaient. D’autres phénomènes optiques plus compliqués, la polarisation, la double réfraction, ne pouvaient être expliqués par la théorie newtonienne.