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aussi considérables. En ce qui concerne l’éther, Cauchy a déduit de calculs fort délicats que la distance des atomes se rapprocherait de la deux centième partie de l’onde rouge ; à ce compte, on trouverait trois cent mille atomes dans la longueur d’un millimètre. M. de Boucheporn de son côté croit pouvoir affirmer que les atomes éthérés sont tellement serrés les uns contre les autres que la somme du vide est réduite au vingtième de la somme du plein. En résumé, ces problèmes demeurent entiers, et la solution n’en est pas même ébauchée.

La lumière qui traverse les corps semblerait devoir nous renseigner sur les espacemens moléculaires. Il existe des substances transparentes dont les molécules laissent passer librement les ondes lumineuses sans que celles-ci perdent rien de leur mouvement. Parmi les corps transparens, un certain nombre sont colorés ; ils arrêtent où absorbent seulement les ondes de certaines couleurs. Ainsi une solution de sulfate de cuivre laisse passer les rayons bleus et arrête au contraire les rayons rouges ; si l’on projette un spectre sur un écran à travers cette solution, on voit l’extrémité rouge du spectre tout à fait interceptée. Un morceau de verre rouge doit au contraire sa coloration à ce que sa substance peut être librement traversée par les ondes rouges, tandis que les ondes plus courtes s’y trouvent éteintes ; si on l’interpose sur le passage d’un faisceau lumineux, le spectre se réduit à une bande d’un rouge vif. Que l’on mette à la fois sur le passage du faisceau la solution de sulfate de cuivre et le morceau de verre rouge, ces deux corps transparens éteignent à la fois tous les rayons, et produisent une opacité complète. Tel autre corps, une solution de permanganate de potasse par exemple, éteindra tout à la fois les rayons rouges et les rayons bleus, et ne laissera passer que les jaunes, qui constituent la partie centrale du spectre. Les corps divers exercent donc par rapport aux ondes lumineuses une sorte de pouvoir d’élection, éteignant les unes, laissant passer les autres. Ici ce sont les plus longues, là ce sont les plus courtes qui sont arrêtées ; ailleurs les plus longues ainsi que les plus courtes se trouvent arrêtées à la fois, et celles de longueur moyenne peuvent seules se frayer un passage. D’où vient cette différence ? Quelle règle préside à cette sorte de triage des rayons lumineux ? Nul doute qu’il ne tienne à la forme des molécules et à la nature de leurs mouvemens. Nous ne savons guère en dire plus long. Les différens mouvemens moléculaires semblent avoir des rhythmes propres en vertu desquels ils s’assimilent plus ou moins ceux des atomes éthérés.

Qu’il y ait ainsi dans les mouvemens moléculaires une sorte de rhythmique d’où résulte l’élection des couleurs, c’est ce que