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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/241

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L’expérience a prouvé que le temps d’exposition nécessaire pour obtenir une teinte déterminée est toujours en raison inverse de l’intensité de la lumière dont on fait usage. On obtient le même résultat en faisant agir une lumière d’intensité donnée pendant deux secondes, que lorsqu’on emploie pendant une seconde seulement une lumière d’intensité double. La valeur d’une teinte est dès lors donnée par la quantité totale de lumière qui a été versée sur un papier photographique de sensibilité normale ; elle est égale au produit de l’intensité lumineuse par le temps d’exposition.

Voici le parti qu’on peut tirer de cette définition. On commence par se procurer une série d’échantillons de teintes d’une valeur connue en notant les temps nécessaires pour obtenir ces teintes avec une lumière dont on a déterminé l’intensité lumineuse par un moyen quelconque ; ensuite on fixe ces échantillons d’une manière inaltérable et on les conserve pour s’en servir dans l’occasion. Il est évident qu’on obtient de cette façon une collection de nuances types dont la valeur peut s’exprimer en chiffres, puisqu’elle est égale, pour chaque épreuve, au produit du temps d’exposition par l’intensité connue de la source de lumière dont on a fait usage. La vigueur d’une épreuve qui sera restée exposée pendant 12 secondes à une lumière d’intensité égale à 3, s’exprimera par le produit 36 ; le même nombre représentera la valeur d’une teinte obtenue en 9 secondes avec une lumière d’intensité 4, puisque le produit de U par 9 est aussi 36. S’agit-il maintenant de déterminer l’intensité d’une autre lumière : on la fait agir, pendant un temps qu’on mesure, sur une feuille de papier normal, et on cherche parmi les échantillons types celui qui offre la même teinte que l’épreuve qu’on vient d’obtenir. Ayant ainsi déterminé, par une simple comparaison, la valeur de cette épreuve, on n’a plus qu’à la diviser par le temps d’exposition observé ; le quotient sera l’intensité de la lumière employée. Supposons que l’épreuve offre la teinte exprimée par le nombre 36, et qu’elle ait été obtenue en 12 secondes ; l’intensité cherchée sera 3, puisque le produit de 3 par 12 est égal à 36, valeur de la teinte obtenue.

Ce principe très simple est la base du procédé inauguré par MM. Bunsen et Roscoe. Pour avoir une gamme d’échantillons régulièrement dégradés du noir au blanc, ils exposent une bande de papier sensibilisé sous un écran mobile qui se retire peu à peu de manière à découvrir successivement toute la longueur de la bande ; une division tracée en marge fait connaître le temps d’exposition qui correspond à chaque point de cette échelle. L’épreuve ainsi préparée représente une infinité d’échantillons ; mais pour la conserver il faut la fixer par l’hyposulfite de soude. C’est là un inconvénient sérieux, car la fixation la fait changer de ton ; en outre toutes les épreuves pâlissent d’abord beaucoup et n’acquièrent qu’au bout de six à huit semaines une stabilité relativement parfaite. Il faut donc traiter ces épreuves comme le vin nouveau : les laisser vieillir ; puis, quand elles ne changent plus, les graduer par comparaison avec une épreuve fraîchement préparée dont on transporte la graduation sur les échantillons fixés