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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/240

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simple point brillant dans le ciel, on conçoit que la part qui nous est faite dans le budget du soleil ne représente qu’une minime fraction de ce qui est dissipé dans l’espace. Un calcul très simple peut faire reconnaître en effet que la lumière que cet astre prodigue lance dans l’univers en une seule minute pourrait déterminer la formation, par voie de combinaison chimique, de 10 trillions de myriamètres cubes d’acide chlorhydrique. Le rayonnement calorifique, estimé de la même manière, représente une chaleur qui ferait fondre par minute 60 millions de myriamètres cubes de glace. On peut calculer de la même manière la chaleur et la force chimique que le soleil dispense aux différentes planètes ; on reconnaît alors que, sur les corps placés aux confins de notre système, toute vie organique semblable à celle qui anime la terre serait impossible.

Tout en poursuivant ces recherches d’un ordre élevé, MM. Bunsen et Roscoe ont trouvé moyen de faire une découverte industrielle : ils ont constaté l’énorme pouvoir photochimique du fil de magnésium brûlant à l’air libre. Cette découverte n’a pas été perdue pour nos photographes, qui ont trouvé dans la lumière uniforme et tranquille des lampes au magnésium un moyen économique de remplacer la lumière électrique.


III

Les méthodes d’observation que je viens d’exposer peuvent conduire à des résultats très exacts ; elles ont fourni les premières données de la climatologie photochimique. Pour la pratiqué journalière des météorologistes, ces procédés seraient trop compliqués et trop délicats. Là, il faut pouvoir opérer promptement, avec des appareils toujours prêts à fonctionner, par un ciel quelconque, malgré brouillards et nuages. En conséquence MM. Bunsen et Roscoe ont dû chercher un moyen plus commode et surtout plus expéditif que celui qui est fondé sur les propriétés du mélange de chlore et d’hydrogène. Ils l’ont trouvé dans l’emploi du papier sensibilisé par le chlorure d’argent. Plusieurs physiciens avaient déjà songé à ce moyen : le principe était connu et pour ainsi dire dans le domaine public ; mais ici encore que de difficultés à vaincre et de doutes à lever avant qu’il fût possible de créer un procédé de mesure susceptible de fournir des résultats dignes de confiance ! Il fallait, avant tout, savoir quel rapport existe entre l’intensité d’une lumière et la teinte plus ou moins foncée de l’épreuve photographique. Comment faire pour exprimer en chiffres les dégradations par lesquelles on passe du noir au blanc ? Comment s’assurer que le papier chloruré a toujours la même sensibilité et qu’il prend toujours la même teinte dans la même lumière ? Il serait fatigant pour le lecteur de nous suivre dans les détails des’ travaux préliminaires par lesquels ces difficultés ont été successivement vaincues ou éludées. Nous nous bornerons à expliquer en quelques mots le principe sur lequel repose le procédé définitivement adopté par les deux chimistes.