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et politiques l’oppression de la race noire, et l’on mettait en péril le crédit américain en donnant aux anciens ennemis de l’Union le pouvoir de répudier la dette encourue pour la guerre émancipatrice. Le peuple américain a vu clair dans ces embûches, et les a renversées avec une admirable droiture de sens. Les électeurs ont donné la majorité aux candidats qui se rallient à l’amendement constitutionnel qui établira le droit d’élection dans les états du sud sur une base juste et rationnelle, celle du rapport entre le nombre des représentans et le nombre des électeurs réels. Si les états du sud tiennent à l’influence au sein du congrès et au nombre des représentans, ils donneront le droit électoral et les garanties de l’égalité aux noirs. Ceux qui refuseront d’assurer leur influence à ce prix se condamneront à une sorte de suicide politique. Cette grande et décisive campagne a été menée avec une admirable énergie et une grande hauteur de pensée par les chefs des radicaux, le vieux Thaddœus Stevens et l’inflexible M. Sumner. Un discours tout à fait remarquable, où la politique du parti républicain a été exposée avec une ampleur et une modération persuasives, est celui que le révérend Ward Beecher a prononcé à New-York. e. forcade.




THÉÂTRES.
Nos bons Villageois, comédie on cinq actes, par M. Sardou.

C’est au public qu’il faut s’en prendre lorsque la critique est obligée par le succès de s’arrêter à des œuvres indignes d’elle ; mais, pour être inévitable, cette tâche de la critique n’en devient ni plus attrayante, ni plus facile, et l’on ne peut guère se résoudre à discuter sérieusement ce qui ne supporte pas l’examen.

Que l’ombre de Ducis nous pardonne si son nom nous revient à l’esprit dans cette circonstance ; mais presque toutes les comédies de M. Sardou nous rappellent un mot charmant de Mme d’Houdetot sur une tragédie de Ducis, Œdipe chez Admète. « Que pensez-vous de la pièce nouvelle ? lui demandait-on. — De laquelle parlez-vous ? répondit Mme d’Houdetot, car j’en ai vu deux hier soir. » C’est ce qui arrive à tous les auditeurs de M. Sardou ; ils voient toujours deux pièces en une seule, et deux pièces qui le plus souvent n’ont rien à démêler l’une avec l’autre. La comédie, parfois gaie, mais le plus souvent grossière des Bons Villageois, précède le drame absurde des amours de M. Morisson ; tout serait remis à sa place, et l’on rendrait aisément justice à ces deux ouvrages, si l’on envoyait le premier au Palais-Royal, tandis que le second irait rejoindre à l’Ambigu ce nouveau drame des Amours de Paris, où l’on voit un riche banquier qui, voulant écarter un prétendant à la main de sa belle-sœur, l’attire ingénieusement dans un four à plâtre et lui brûle la cervelle. Mais si M. Sardou agissait avec cette franchise, s’il faisait loyalement des parades bouffonnes pour certains théâtres et des mélodrames pour certains autres, il renon-