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Vénétie la neutralité de l’Italie et l’appui de la France, et cette combinaison n’empêchait pas absolument une réforme de la confédération germanique. Le parti libéral allemand n’avait donc rien à y perdre ; mais pour entrer dans cette voie il fallait prévoir ce qui est arrivé, la prompte et décisive victoire de la Prusse.

Nous était-il si difficile de nous y attendre, et même, sans une étude approfondie de l’organisation militaire de la Prusse, les causes générales n’auraient-elles pas dû nous frapper, à défaut des causes particulières qui échappent presque toujours à la prévoyance humaine ? Qu’est-ce que l’Autriche en effet ? C’est l’état qui a représenté tant qu’il l’a pu, avec la fidélité la plus obstinée, l’esprit de l’ancien régime et l’esprit de 1815, destinés à périr l’un et l’autre sous les coups du temps. Le prince de Metternich, avec tout son esprit, ses trésors d’expérience, ses ressources de persévérance et d’adresse, avait obtenu un retard de trente années ; mais le vent de l’émeute n’avait eu qu’à souffler un jour pour renverser l’édifice. La leçon fut courte, mais rude, et au lieu d’en profiter le gouvernement de Vienne, après avoir tout cédé quand il était le plus faible, a tout repris dès qu’il s’est vu le plus fort. On nous a fastueusement annoncé le nouveau règne comme une restauration exemplaire du principe de l’autorité. Pour mieux affermir le pouvoir, on a tenté d’abord de le rajeunir, par une administration à la moderne et de le sanctifier par un concordat du moyen âge. Puis, un peu dégoûté de l’une comme de l’autre, on a essayé d’un gouvernement représentatif central ; puis on y a renoncé pour expérimenter les représentations locales. L’expérience attend encore un succès qui la juge. Et pendant qu’on tâtonnait au dedans, sans suite et sans ensemble, on avait invoqué d’abord le secours de la Russie pour l’abandonner en la voyant aux prises avec la France et l’Angleterre, pour profiter de ses pertes et se poser en Orient sa rivale et son ennemie. Bientôt s’élevait la question italienne. On s’y prenait si bien qu’on se donnait les apparences de l’offensive, quand de fait on répondait à une provocation, et cependant on était si peu prêt pour l’agression qu’on nous laissait le temps d’arriver, et que l’on perdait en un mois la plus belle province en se plaignant d’être délaissé par la Russie et la Prusse, qu’on avait pris tous les soins possibles d’aliéner. Cela fait, on leur rend la pareille au premier bruit de l’insurrection polonaise. Contre toute attente, on la ménage d’abord, on la seconde, on se montre presque disposé à revenir sur le partage de 1772, jusqu’à ce que, faisant subitement volte-face, on aille au secours de la Russie dans l’œuvre d’une répression rigoureuse : on fait mine, en se rapprochant d’elle et de la Prusse, de rentrer dans les voies de la sainte-alliance ; mais nullement,