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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/531

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du soleil. Une faction de mer se compose le plus souvent de sept hommes, dont l’un guette pendant le jour et les six autres veillent durant les heures de ténèbres. Ils se forment alors en patrouille et s’avancent le long des sables ou des rochers à la rencontre d’autres groupes avec lesquels ils entrent en pourparler et auxquels ils délivrent quelquefois des messages pour qu’on puisse ainsi bien s’assurer de la fidélité du service. Durant l’hiver, quand le ciel et la mer font rage, la vie de ces gardes est exposée à plus d’un danger. Il y a cinq ou six ans, par une nuit noire et tempétueuse, un officier, qui était de service sur les côtes de Hunstanton, dans le comté de Norfolk, perdit de vue le sentier qui serpente au bord des falaises surplombant au-dessus de la mer, et fut précipité d’une hauteur de quatre-vingts pieds parmi les fragmens de roche qui encombrent la plage. Nul au monde n’entendit le bruit de sa chute; mais quelques jours après des camarades qu’on avait envoyés pour le chercher retrouvèrent ses restes mutilés. La même nuit, un autre accident tragique eut lieu sur une autre partie des côtes, et fut également suivi de mort.

Les coast-guards sont bien les sentinelles chargées d’exercer jour et nuit dans leur district la police des mers. Tout navire ou bateau à mine suspecte est aussitôt dénoncé par eux d’une station à une autre par le moyen de télégraphes qui couvrent d’un cordon protecteur les rivages de la Grande-Bretagne. Comme pourtant le déclin de la contrebande laisse aux agens du fisc moins d’occasions de risquer leur vie, on utilise d’un autre côté leur zèle pour le service de sauvetage. Il a été plus facile de réprimer la fraude que d’abolir les tempêtes, et c’est surtout contre les stratagèmes redoutables de l’océan qu’ont maintenant à lutter ces hommes connus aussi sous le nom de bateliers, boatmen. Découvrent-ils sur mer un équipage donnant des signes de détresse, ils doivent se tenir prêts à porter secours aux naufragés avec la fidélité aveugle des chiens de Terre-Neuve. A chaque station de gardes-côtes est attaché un bateau, life-boat, dans lequel ils sautent en pareil cas, et sur lequel ils s’avancent aussitôt au-devant du bâtiment menacé[1]. On estime à sept ou huit cents par année le nombre des personnes qu’ils ar-

  1. Il ne faudrait point confondre ces life-boats ni le service des gardes-côtes avec une institution bien différente qui a été dans cette Revue même l’objet d’une autre étude (voyez la livraison du 15 mars 1864). Les coast-guards n’ont généralement ni ceinture de sûreté ni appareil en liège pour les soutenir au-dessus de l’eau en cas d’accident, et quant à leur bateau de sauvetage, il est bien loin d’être construit d’après les règles de l’art qui mettent les autres life-boats à l’abri des fureurs de la lame.