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culiers, dont les évolutions vitales ont pour effet d’altérer la composition du liquide et d’en modifier le goût. Les recherches du savant chimiste sur ce sujet important viennent d’être publiées dans un volume orné d’un grand nombre de planches coloriées, et dont nous allons donner une analyse sommaire.

L’idée que l’on se faisait autrefois des maladies du vin était bien vague. Le vin, disait-on, est toujours en travail. Il est le produit de la fermentation du moût de raisin ; mais, quand le vin est fait, l’équilibre n’est pas encore entièrement établi entre les divers principes de la liqueur. Ces principes continuent de réagir les uns sur les autres, et si par hasard une de ces réactions occultes est favorisée par les circonstances, le vin devient malade. Le comte Chaptal attribue la plupart des altérations du vin à un excès du ferment qui a produit l’alcool, et qui n’aurait pas été épuisé par ce travail. Cette opinion est celle de la plupart des auteurs qui ont écrit sur la matière ; on cherchait la cause de la dégénération du vin dans des réactions purement chimiques compliquées de forces inconnues, et les divers procédés de la vinification en usage jusqu’à ce jour répondent à cette théorie. On combattait les symptômes du mal, ne pouvant s’attaquer à la source inconnue. La conséquence de ces procédés incertains ne pouvait être que ce qu’elle a été : les remèdes, aussi multiples que peu sûrs, réussissaient quand le hasard le voulait. On sait que chaque année la maladie de l’amertume détériore de grandes quantités des meilleurs vins de Bourgogne. Les propriétaires affirment volontiers que leurs vins sont en parfait état, mais le plus souvent il est facile de s’assurer que cette assertion est dictée par l’intérêt ou par l’amour-propre. M. Pasteur, après avoir examiné les vins de bon nombre de caves, est arrivé à cette conviction, qu’il serait difficile d’en trouver une seule qui ne renferme pas quelque portion de vin plus ou moins altéré. Les vins d’exportation sont encore plus sujets aux avaries, et les pertes qui en résultent chaque année sont immenses.

Le résultat principal des recherches de M. Pasteur est d’établir que les variations que le vin subit avec le temps ont pour origine des influences extérieures, que le vin vieillit par suite d’une oxydation ou combustion lente, et que les altérations maladives qu’il éprouve sont déterminées par des végétations microscopiques. De là une conséquence capitale : détruisez la vitalité des germes de ces champignons par un moyen quelconque, et le vin sera à l’abri des maladies qu’ils occasionnent. Nous verrons tout à l’heure que ce moyen consiste dans une simple élévation de température.

La plus commune des maladies qui peuvent atteindre le vin est l’acescence. Le vin se transforme partiellement en vinaigre ; on dit qu’il est devenu aigre, acide, piqué. Ce changement s’opère sous l’influence du mycoderme appelé fleur du vinaigre. Les vins ordinaires à tous les âges et les vins de choix lorsqu’ils sont nouveaux n’offrent guère que le mycoderme inoffensif qui constitue la fleur du vin proprement dite ; il n’altère pas la qualité du vin : tout au plus pourrait-il diminuer le bouquet de certains vins fins,