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la flamme d’une lampe d’émailleur. L’espace au-dessus de l’eau étant entièrement vide, celle-ci se trouve soustraite à la pression atmosphérique. Quand la cornue est complètement refroidie, on la place dans de la glace concassée au milieu d’une chambre dont la température n’est qu’à peu de degrés au-dessus de zéro. La glace extérieure fond lentement, mais au bout de quelques heures on trouve la surface de l’eau intérieure couverte d’une lame de glace adhérente aux bords du vase. Cela doit arriver ainsi. En effet, son point de congélation est à + 0°, 0075, tandis que celui de la glace extérieure fondante est à zéro, parce que celle-ci est soumise à la pression atmosphérique, tandis que l’eau contenue dans la cornue étant soustraite à cette pression gêle à une température un peu supérieure à zéro. La pression abaisse donc le degré de congélation de l’eau pure; voilà un point parfaitement établi. Mais un glacier n’est pas de l’eau pure, c’est un mélange d’eau et de glace. Quand on comprime un pareil mélange dans un cylindre de fonte, la température s’abaisse comme dans le cas précédent; seulement, en passant à l’état de glace, l’eau n’emprunte plus la chaleur nécessaire pour écarter ses molécules uniquement à elle-même, elle l’emprunte encore à la glace avec laquelle elle est mélangée. Cette chaleur fond une portion de cette glace et devient latente. comme on disait autrefois; mais la glace refroidie par cet emprunt congèle à son tour la lame d’eau qui la sépare d’un morceau de glace voisin, et les deux morceaux se soudent d’autant plus intimement que la pression est plus forte. Cette explication est due à M. James Thomson, professeur à Belfast et frère du célèbre physicien que nous avons nommé plus haut.

Un glacier, l’observation l’a prouvé, n’est qu’un mélange d’eau et de glace dont la température est toujours à zéro. Le raisonnement aurait pu le faire prévoir. En effet, d’un côté les températures extérieures supérieures à zéro ne peuvent y pénétrer, car elles deviennent latentes en fondant la surface de la glace ou la neige qui la recouvre. L’eau résultat de cette fusion, s’infiltrant dans les fissures du glacier, finit par imbiber la masse tout entière. Les températures de l’hiver ne pénètrent pas davantage dans le glacier, parce que la neige qui le recouvre dans cette saison est mauvaise conductrice de la chaleur, et d’ailleurs le frottement du glacier contre les parois du couloir dans lequel il se meut engendre encore une quantité de chaleur suffisante pour contre-balancer les froids de l’hiver.

Tous ces phénomènes n’auraient pas lieu, si le glacier n’était qu’un amas de neige sèche, pulvérulente et à température au-dessous de zéro, comme celle qui tombe dans les hautes régions et dans