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constamment en mer le puissant Génois. Réunis aux navires français, les navires d’André Doria étaient allés du port de Savone devant le port de Gênes qu’ils avaient étroitement bloqué. Tandis que la flotte commandée par André Doria fermait le golfe, capturait les vaisseaux et ruinait le commerce génois, un corps de troupes placé par Lautrec sous les ordres de César Fregoso, dont la famille, rivale des Adorni, avait été souvent à la tête de la république, menaçait Gènes du côté de la terre. Cette double attaque provoqua une des révolutions alors si fréquentes dans cet état agité. Les partisans de Fregoso et des Doria se soulevèrent, le doge Antoniotto Adorno s’enfuit, et Gènes se replaça sous la domination de François Ier. Le maréchal Théodore Trivulzi fut nommé gouverneur de la république, encore une fois transformée en seigneurie.

Les affaires de François Ier prospéraient en Italie, et les impériaux s’y affaiblissaient de jour en jour. La Lombardie leur était enlevée presque tout entière. Le roi de France tenait le comté d’Asti, vieux patrimoine de la maison d’Orléans, la ville de Savone, la seigneurie de Gènes et presque toute la côte de la Ligurie. Le duc Francesco Sforza était rentré en possession de la plus grande partie de son duché de Milan. Maître des fortes places de Lodi et de Crémone depuis la précédente campagne, il venait de recevoir Alexandrie, Novare, Vigevano, Abbiate-Grasso, Pavie des mains de Lautrec, qui les lui avait restituées après les avoir conquises. Il ne restait, pour ainsi dire, plus que Milan au pouvoir des impériaux. Antonio de Leyva occupait avec assez peu de troupes cette ville considérable et fort mal disposée. Il y était sans argent, presque sans vivres; il avait les habitans contre lui, et malgré la vigueur éprouvée de son caractère et sa rare opiniâtreté il n’aurait pas pu y tenir longtemps, s’il y avait été attaqué. Francesco Sforza le demandait avec instance à Lautrec en assurant, ce qui était vraisemblable, qu’Antonio de Leyva serait obligé d’évacuer Milan sans savoir comment il opérerait sa retraite. Achever, puisqu’on l’avait commencée, la conquête du Milanais, d’où les impériaux auraient été expulsés, et où un prince italien aurait été solidement établi, eût présenté de grands avantages. La Haute-Italie, depuis le Piémont jusqu’à l’Adriatique, soustraite à la domination des impériaux, aurait été désormais à l’abri de leurs agressions, et Lautrec aurait pu s’avancer vers le centre et le sud de la péninsule sans avoir rien à craindre du côté du nord.

Tandis que Francesco Sforza le suppliait de compléter son œuvre par la prise de Milan, le cardinal Cibo, légat de Clément VII à Bologne, le pressait d’aller au secours du souverain pontife, confor-