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tout objet de métal nous reporte à l’âge de pierre. Et en effet on en a déterré de nombreuses pierres, des morceaux d’os et de corne taillés, des poteries grossières et faites à la main. L’imperfection du travail rappelle la période des cavernes, le premier ou le second âge de la pierre taillée. Toutefois on a vu que le style des armes et des ustensiles n’est pas le seul critérium pour juger de la date d’un dépôt, il faut prendre aussi en considération la faune. Or on n’a rencontré dans les kjoekkenmoeddings aucune espèce paléozoïque. Sauf le lynx et l’urus, qui n’ont vraisemblablement disparu que depuis l’époque historique, il ne s’y est trouvé aucun ossement d’espèces éteintes en ces climats. Des restes de cochon et de chien en ont été extraits ; on ne peut toutefois affirmer que ces mammifères fussent alors domestiqués. Ces dépôts se placent donc dans l’ordre chronologique à côté des plus anciens dolmens et des cavernes ossifères de l’époque la plus récente. Si l’industrie s’y rencontre encore aussi rudimentaire, c’est sans doute que les peuplades qui ont abandonné au bord de la Mer du Nord les débris de leurs repas étaient demeurées en arrière de leurs voisins, placés dans des conditions meilleures et chez qui l’art prenait son premier essor. Du reste rien n’empêche de supposer- que, bien qu’appartenant au troisième âge de la pierre, les kjoekkenmoeddings soient plus anciens que les dolmens. Il faut aussi remarquer que les silex et les cornes taillés de ces amoncellemens semblent être le plus ordinairement des pièces de rebut, car plusieurs n’ont été qu’ébauchées.

Des amas analogues aux kjoekkenmoeddings ont été signalés en d’autres contrées. On en connaît dans le Cornwall, sur la côte nord de l’Écosse, aux Orcades. On a récemment rencontré sur les côtes de Provence un amoncellement où se trouvaient des silex taillés associés à des débris de coquillages et de charbon, à quelques ossemens d’animaux. Les terramares de l’Émilie, amas contenant de la cendre, du charbon, des silex et des os travaillés, des ossemens d’animaux, dont la chair paraît avoir été mangée, des tessons de poteries et divers autres restes de l’industrie des premiers âges, offrent également une grande analogie avec les kjoekkenmoeddings. Les espèces animales dont les débris apparaissent dans ces dépôts ou marières appartiennent à l’époque actuelle. Les terramares, pas plus que les tertres factices du littoral Scandinave, ne sauraient donc remonter aux deux premiers âges de la pierre. Il reste maintenant à faire connaître une dernière catégorie de dépôts correspondant à la fin de l’époque qui nous occupe, ce sont les cités lacustres ou palafittes.

En 1853, la grande baisse des eaux du lac de Zurich avait