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milliers d’années ; elle a été remplacée par le chêne, puis par le hêtre. Au reste une circonstance explique le haut degré de perfection que le travail de la pierre a atteint en Scandinavie, c’est que le silex y est d’une qualité supérieure et se prête mieux à la taille. On se servait pour l’user et le polir de meules dormantes, et on savait y percer des ouvertures de forme exactement circulaire.

En général, les haches de l’époque de la pierre polie diffèrent de celles de l’époque de la pierre simplement taillée en ce que celles-ci fendaient ou perçaient par leur petite extrémité, tandis que les premières ont au contraire le tranchant à l’extrémité large. Certaines haches, de cette seconde époque étaient destinées à être emmanchées, tandis que d’autres semblent avoir servi de couteau ou de scie pour l’os ou la corne. A cela près, la nature des armes et des ustensiles est généralement la même aux deux époques : ce sont des haches, des couteaux, des têtes de flèche barbelées, des grattoirs, des alênes, des pierres de fronde, des disques, des poteries grossières et des grains de collier en coquillage ou en terre qui déjà se montrent à l’âge précédent. Quoiqu’on donne le nom d’âge de la pierre polie à cette troisième phase de la période, anté-historique il ne faudrait pas supposer que ce soit toujours le poli de la matière qui la caractérise ; le fini, la perfection de l’exécution peuvent aussi faire juger que des armes et des ustensiles s’y rapportent chronologiquement. Tel est le motif qui nous engage à rapporter à cette troisième phase la plupart des silex et des cailloux taillés ou percés découverts dans les grottes de l’Italie, notamment dans celle du Monte-Argentale en Toscane, pièces qui sont conservées au musée de Pise.

Nous venons de faire connaître les sépultures qui sont contemporaines de l’âge de la pierre polie ; passons à un autre ordre de dépôts auxquels convient la même place dans l’ordre chronologique.

On observe sur les côtes du Danemark et de la Scanie des amas considérables de coquilles comestibles, d’huîtres principalement. La plus simple inspection suffit pour faire reconnaître que ces dépôts n’ont pas été apportés par les flots. Ce sont des accumulations manifestes de débris, de repas, ce qui justifie le nom de kjoekkenmoeddings (rebuts de cuisine) sous lequel ils sont connus dans le pays. Les kjoekkenmoeddings s’étendent souvent sur des longueurs de plusieurs centaines de mètres, sur une largeur cinq ou six fois moindre et offrent une hauteur de 1 à 3 mètres environ. On ignore quelles sont les populations qui abandonnèrent ainsi sur les rivages de la Scandinavie les reliefs de leurs grossiers festins ; elles ne pouvaient vivre dans un temps de civilisation développée, car de tels alimens sont propres à des sauvages. L’absence complète dans ces amas de