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IV

Dans l’état alarmant de l’Europe, quand il s’agit de la sûreté de la France et de l’honneur de ses armes, l’opposition systématique nous semblerait criminelle ; nous n’avons point de goût pour une critique stérile : cherchons donc ce qu’il peut y avoir d’utilement praticable dans le projet. Franchement, il n’y a à louer sans restriction que le terme de cinq années assigné au service actif. Il suffit à l’instruction, à la parfaite cohésion de toutes les parties d’une armée. Il donnera des soldats expérimentés sans être trop vieux.

La réserve sera excellente à deux conditions. Voici la première : soit qu’ils aient servi cinq ans, soit qu’ils appartiennent à la seconde moitié du contingent, les hommes de la réserve n’auront pas besoin d’autorisation pour se marier, et sur la présentation de leur acte de mariage ils seront immédiatement rayés des contrôles, et ne pourront y être réintégrés. Seconde condition : avant de rejoindre l’armée active, la réserve ne sera ni réunie, ni exercée.

On vante l’adresse dans le maniement des armes acquise en quelques semaines de réunion annuelle par les gommes de la seconde moitié des classes appelées. Nous n’en sommes ni étonné, ni séduit. Ils sont jeunes, bien constitués, soutenus par la certitude de retourner promptement dans leurs foyers et par l’espoir d’y rester indéfiniment. Rappelez-les pour un service sérieux de quelques-années, et vous vous apercevrez que leur petite science, facile à acquérir, facile à oublier, ne vaut pas ce qu’elle a coûté au trésor, ce qu’elle a coûté aux familles, ni ce qu’elle a fait perdre à ces jeunes soldats : ils n’ont plus leur premier respect des chefs d’ordre secondaire, ni la première ferveur de la bonne volonté.

Il y aurait injustice et maladresse à ne pas citer encore ici l’exposé des motifs :


« Les courtes réunions de la réserve actuelle témoignent chaque jour combien sont grandes et merveilleuses l’aptitude et l’intelligence de nos jeunes gens dans les exercices militaires et la rapidité avec laquelle ils se forment au métier des armes. Ces qualités précieuses offrent une garantie qu’aucune nation en Europe ne possède a un égal degré. »


C’est parler d’or. Nul n’aurait mieux dit ; Laissez donc ces intelligens et allègres jeunes gens soutenir leurs familles et accroître la richesse de la nation jusqu’au moment où celle-ci, menacée dans son honneur ou dans ses intérêts, fera appel à leur dévouement.