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l’heure de la retraite a sonné. » C’est ainsi que Faraday se sépara de ses auditeurs. Il est mort le dimanche 18 août 1867, âgé de soixante-seize ans.

Sa vie : a été bien remplie. La moitié des découvertes qu’il a jetées comme une semence féconde dans le champ du progrès suffirait à immortaliser le nom d’un homme. En dévoilant les lois de l’induction électrique, il nous a presque donné une force nouvelle, dont les applications se sont multipliées dans tous les sens. Les machines d’induction et les machines magnéto-électriques, dont les rapides transformations nous surprennent et nous étonnent, sont en germe dans ses travaux. L’éclairage électrique, l’exploitation des carrières, le percement des tunnels, la déflagration des mines à grande charge, sont facilités dans une proportion inespérée par l’emploi des bobines d’induction. La physique emprunte aux recherches de Faraday ses plus belles expériences. L’art de guérir lui doit des appareils dont les effets merveilleux ont rendu la santé à des milliers de malades ; on appelle faradisation le procédé qui produit ces résultats. Les courans induits constituent en effet la forme de l’électricité qui est la plus propre aux applications médicales, parce qu’on peut en graduer les effets chimiques et calorifiques, de manière à ne pas désorganiser les tissus, tandis que l’emploi des courans ordinaires de la pile ou celui d’une batterie de Leyde est souvent dangereux.

On voit que les traces de Faraday sont marquées dans les progrès récens de presque toutes les branches de la science et de l’industrie. Ce que l’on peut dès maintenant pressentir, ce que l’avenir fera ressortir plus manifestement encore, c’est la portée philosophique de toutes ses recherches, c’est l’étendue des conséquences qu’elles doivent produire pour la doctrine moderne de l’unité des forces naturelles. Ses travaux sont de ceux qui resteront ; tout ce qu’il a découvert est acquis à la science d’une manière définitive. Si dans sa longue carrière il a dû perdre ses illusions sur la supériorité morale des savans, illusions dont la naïveté fit sourire Davy dans leur première entrevue, il a du moins fait tout ce qui était en lui pour les entretenir chez ceux qui avaient le bonheur de le voir dans l’intimité.


R. RADAU.