Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 71.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

politique, aux « points noirs » qui assombriraient l’horizon. Des trois manifestations de la pensée impériale, c’est la dernière, celle d’Amiens, qui est la plus importante et la plus remarquable. L’empereur y a reconnu avec une égale franchise les difficultés que sa politique a rencontrées. Il n’a point marchandé la qualification « d’insuccès » à notre entreprise sur le Mexique ; il n’a pas hésité à joindre à la série de mécomptes commencée par notre politique au-delà de l’Océan « les événemens qui se sont accomplis en Allemagne. » Il n’a point dissimulé, et c’est de sa part fort aimable, car la réalisation de sa promesse dépend exclusivement de lui, « l’espoir de voir des institutions plus libérales s’introduire paisiblement dans les mœurs publiques. » Il a montré que la « stagnation momentanée des transactions commerciales » n’échappait point à sa sollicitude. Sous l’impression des échecs récens, il a réveillé, non sans bonne grâce, le souvenir des accidens passés et a signalé dans le séjour de six ans qu’il fit autrefois à Ham la preuve que « le malheur est une bonne école pour apprendre à supporter le fardeau de la puissance et à éviter les écueils de la fortune. » Enfin il a prononcé ce mot magique de paix, dont on avait constaté l’absence avec effroi dans les deux premières harangues, il a constaté que le pays « compte sur le maintien de la paix. » Le voyage de Flandre nous laisse donc sous l’aveu que l’expédition du Mexique et les événemens d’Allemagne ont été des insuccès, mais que nous pouvons, profitant de l’école du malheur, compter sur la paix et espérer dans la liberté.

Les discours impériaux sont des monologues, et il manque aux idées sommaires qu’ils expriment d’être ventilées par la contradiction. Il y a eu d’ailleurs dans leurs assertions, depuis quelque temps, des variations trop fortes pour qu’on se soumette à y reconnaître les conditions de la certitude et de l’infaillibilité. Qui comparerait le discours d’Auxerre de l’année dernière aux harangues de cette année verrait un curieux contraste ! Il faut donc rapprocher les déclarations impériales des faits auxquels elles se rapportent. L’intérêt qu’elles présentent est surtout de faire connaître les dispositions avec lesquelles la pensée impériale aborde les situations qui sont devant nous.

L’entrevue de Salzbourg, quelle que soit l’interprétation qu’on en donnera dans les documens ostensibles de la politique officielle, est le fait actuel le plus caractéristique de la situation européenne. On pourra assigner pour principale cause à cette démarche la nécessité d’une courtoisie douloureuse, l’échange des condoléances inspirées par la fin tragique de l’empereur Maximilien. Au-dessus de l’effusion des sentimens personnels planent en ce moment les conformités d’intérêt politique qui peuvent unir la France et l’Autriche. Malgré tout ce qui a été dit sur la marche historique des grandes agglomérations nationales et sur la liberté des alliances qui nous est ouverte, il est clair que les conditions du droit public ont été gravement altérées par les derniers événemens, et il est