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sort leur est réservé ; par quelles transformations successives ils ont passé avant de prendre l’aspect sous lequel ils nous apparaissent, et quel en peut être le terme final de développement. Nous voilà donc en pleine cosmogonie, et les perspectives que la science nous ouvre sur l’inconnu ; si elles ne sont pas plus poétiques que les fictions de la mythologie, ont assurément plus de grandeur. Cela ne veut pas dire que les résultats obtenus soient nécessairement vrais ; il y a quelquefois de la rêverie dans les calculs comme ailleurs, car l’analyse mathématique n’est qu’un instrument qui sert à développer les conséquences d’une hypothèse.

Laplace a inauguré ce genre de spéculations par sa note sur l’origine et la formation du système planétaire. Le soleil, une ancienne nébuleuse qui s’est condensée en se refroidissant, les planètes, des anneaux détachés de l’immense atmosphère de ce chaos tournant, abandonnés aux étapes successives du mouvement de retraite et de concentration qui s’est terminé par la naissance du globe, solaire, voilà les conceptions qui servent de base au système cosmogonique de l’illustre géomètre français. Sans être en définitive démontré ni hors de contestation, ce système se recommande cependant par le nombre des faits dont il rend compte d’une manière très satisfaisante. La communauté d’origine des planètes et de leurs satellites fait comprendre pourquoi les mouvemens de translation et de rotation de ces corps sont tous dirigés dans le même sens, qui est aussi celui de la rotation du soleil ; elle explique également le peu d’inclinaison des orbites. La fluidité primitive des sphères planétaires est attestée par l’aplatissement qu’elles ont subi, et pour la terre en particulier la géologie a fortifié cette hypothèse par une foule de découvertes plus ou moins récentes. Dans ces derniers temps, l’étude chimique des aérolithes et l’analyse spectrale des étoiles ont encore apporté des preuves nouvelles en faveur des idées de Laplace. M. Faye, en partant des résultats de ces recherches, a essayé de préciser les phases par lesquelles doit passer une nébuleuse qui devient soleil. Une masse gazeuse assez chaude pour que les différens élémens qui la composent ne puissent pas se combiner chimiquement rayonne très peu et n’offre par conséquent qu’un faible éclat. C’est la phase des nébuleuses proprement dites, phase d’une durée immense à cause de la lenteur avec laquelle s’opère le refroidissement. A mesure que la chaleur interne s’en va par la surface qui touche au vide glacial des espaces célestes, la température des couches supérieures s’abaisse, et le jeu des affinités commence à s’y manifester. Il s’y forme des dépôts de matières solides ou liquides qui contribuent dans une proportion très notable au rayonnement de l’astre naissant, comme les parcelles de carbone alimentent la lumière d’une flamme de gaz ; mais, la lumière devenant plus vive, il se perd aussi plus de chaleur. En même temps ces scories tombent vers le centre de la masse et s’y volatilisent de nouveau, ce qui donne lieu à un