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efforts tournèrent contre lui. Aucun succès n’était en effet possible pour le parti des mécontens sans l’active coopération des huguenots, fort nombreux dans le Poitou, et qu’il s’agissait d’introduire en Bretagne au moyen des intelligences qu’y possédaient MM. de Rohan. Or l’attitude menaçante des calvinistes sur les marches de la province était précisément pour la bourgeoisie nantaise l’objet du plus constant effroi. Ce fut dans la pensée de résister aux religionnaires et nullement pour prendre vis-à-vis du gouvernement de Marie de Médicis une position comminatoire que les compagnies bourgeoises se constituèrent au grand complet. Ce fut afin de seconder le duc de Montbazon, demeuré fidèle au roi, qu’elles reprirent en 1614 le pénible service des jours orageux, que la ville renouvela tout le matériel de son artillerie et remit en parfait état de défense les fronts démantelés de ses longues fortifications. Ce que voulait le gouverneur était donc tout le contraire de ce que voulaient les Nantais. Traitant avec les protestans pendant qu’il adressait au roi son frère des assurances réitérées de fidélité, Vendôme flottait entre la rébellion et l’obéissance ; mais plus il inclinait vers les mécontens et les calvinistes, dont l’intérêt était alors inséparable, plus les Bretons se montraient fervens catholiques et royalistes dévoués. Ce fut ainsi que la Bretagne, malgré les efforts des princes mis à sa tête par l’imprudente tendresse de Henri IV, demeura la moins agitée de toutes les provinces du royaume sous le gouvernement de Marie de Médicis et de ses conseillers florentins. Elle accueillit le nouveau règne avec d’autant plus de faveur que la régente, alarmée des bruits qui arrivaient à la cour sur les dispositions de l’ouest, avait accordé à la Bretagne la chose à laquelle cette province tenait le plus, une ample et générale confirmation de tous ses droits, privilèges et libertés.

Au moment où s’ouvraient à Rennes les états de 1611, l’assemblée recevait en effet avec les lettres confirmatives qu’avait refusées Henri IV une déclaration par laquelle Louis XIII révoquait divers édits contenant création de nouveaux offices. Avant la clôture de la session, conformément à cette royale promesse, elle entendit la lecture d’une ordonnance de sa majesté portant révocation de cinquante-neuf édits en vertu desquels avaient été créés des offices dont les cahiers de remontrances avaient constaté l’inutilité et demandé la suppression. Cette ordonnance ajoutait une amnistie pleine et entière pour toutes les condamnations prononcées en matière d’impôt, donnait les assurances les plus formelles relativement à la franchise du sel, et promettait la punition des archers qui s’étaient livrés sur les marchés de la province à des voies de fait et vexations sous prétexte de punir les faux-sauniers ; elle contenait enfin la déclaration précise qu’aucune taxe ne serait levée en Bretagne sans