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Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/530

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la conscience politique est en Angleterre en pleine sécurité. Au dehors, la politique anglaise se tient à l’écart de toute conspiration et de toute intrigue ; à l’intérieur, elle a foi dans la bonne volonté et l’énergie des citoyens loyalement nantis des vertus et des forces de la liberté.

Voilà un peuple et un gouvernement qui sont exempts des préoccupations inquiètes et sournoises que se renvoient ailleurs les uns les autres avec une farouche humeur les peuples privés de leurs droits légitimes et les gouvernemens qui ne peuvent oublier les usurpations par eux commises sur la liberté des citoyens. Nous admirons le témoignage de cette application confiante à bien faire, de cette chaleur à reconnaître et à glorifier les heureux résultats d’une libre vie publique dans les derniers discours prononcés par M. Disraeli à Edimbourg, où on l’admettait à la bourgeoisie de cette grande cité municipale, et au banquet d’inauguration du lord-maire. Les Anglais ont le mérite d’être reconnaissans envers les hommes qui prêtent à leurs intérêts publics le concours de leurs talens et de leurs travaux. Ils multiplient en ce moment les occasions de prodiguer à M. Disraeli les témoignages de leur gratitude pour le succès de son acte de réforme. L’heureux chancelier de l’échiquier répond à ces hommages avec une chaleur cordiale. Son éloquence de bons sentimens semble grandir par l’intensité du ton et la franchise directe des déclarations. A Edimbourg, il a prononcé un discours entraînant sur la situation des classes ouvrières d’Angleterre. Il a rappelé que depuis trente-cinq ans trente mesures favorables à l’amélioration du sort des ouvriers avaient été adoptées par la chambre des communes, et que ces mesures, il les avait lui-même toutes votées. Il a remercié avec émotion les auteurs de l’adresse qui lui était présentée d’avoir témoigné leur bon espoir dans l’avenir et leur foi dans la continuité du développement moral et matériel des classes laborieuses. Il a longuement parlé de l’éducation populaire, et parmi les instrumens d’instruction les plus efficaces il n’a pas craint de signaler la liberté de la presse. « Lorsque j’entends dire, s’est-il écrié, que le peuple britannique manque d’instruction et qu’il est inapte à exercer à cause de cela le droit naturel à tout Breton, le droit de suffrage, je dis que nous oublions que dans ce pays nous avons une source d’éducation qui marche sans cesse, une éducation de l’ordre le plus élevé, qui apporte les plus grandes ressources pour l’accomplissement des devoirs publics et politiques, et c’est, Dieu merci, l’influence d’une presse libre. Lorsqu’on recherche le degré d’instruction d’un peuple, et qu’on met en avant les statistiques des pays continentaux et les divers degrés où l’instruction y est répandue pour opposer un parallèle désavantageux au peuple du royaume, je pense toujours que ces froids statisticiens et ces philosophes avec leurs chiffres oublient l’influence du grand pouvoir éducateur dont je viens de parler, et je me rappelle avec orgueil, et avec consolation que l’Angleterre est le seul pays où la presse libre a une existence pratique et réelle. » Voilà les