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la crise qui vient de passer sur elle comme un tourbillon. C’est l’exacte mesure de la fidélité des Romains au pouvoir temporel, fidélité toute négative, précaire, inerte, que l’occupation étrangère n’est pas faite pour échauffer et pour raffermir. Une intervention nouvelle, c’est un progrès de plus dans le travail de fusion entre Rome et l’Italie.

Somme toute, il est clair, je crois, que cette seconde expédition romaine, née fatalement peut-être d’une situation violente et fausse, n’a profité ni à la France ni à la papauté, tout en devenant la source d’une amertume profonde pour l’Italie. Elle n’a fait qu’accumuler les difficultés, exciter les haines, raviver les antagonismes. Il y a des momens où une conciliation directe, une transaction a été peut-être possible ; elle ne l’est plus guère aujourd’hui. Entre l’Italie et la papauté, une entente serait assez difficile ; entre la France et l’Italie, il n’y a plus de place sans doute pour quelque nouvelle convention de septembre. De ce côté on est allé jusqu’où on pouvait aller, on est arrivé en face de l’impossible. Et maintenant, cette solution qui ne peut naître d’un rapprochement direct de situations si tranchées, est-ce un congrès qui va la trouver ? Ce congrès qui ne s’est pas réuni en 1860 va-t-il être plus heureux aujourd’hui et découvrir le moyen d’apaiser une crise morale, religieuse, politique sur laquelle sept années de plus ont passé ? Je comprends l’intérêt qu’il y a pour la France à se soulager un peu du poids de toutes ces affaires de Rome, à partager, ainsi qu’on l’a dit, cette tâche avec les autres gouvernemens, comme aussi il ne serait pas trop surprenant que l’Europe se montrât un peu moins pressée de se saisir d’une question à laquelle elle est restée jusqu’ici étrangère, que la France a paru jalouse de garder sous sa protection, sous sa direction, en évinçant même ceux qui voulaient s’en mêler. Admettons cependant tous les embarras préliminaires écartés et le congrès réuni : ainsi voilà l’Angleterre protestante, la Prusse également protestante, la Russie gréco-orthodoxe ou schismatique, sans parler des puissances catholiques, cherchant ensemble ce qu’il faut de souveraineté temporelle, ce qu’il faut d’âmes et de territoire pour assurer l’indépendance spirituelle d’un pape, ayant à se prononcer entre l’Italie, revendiquant Rome au nom de la nationalité, et le saint-siège, revendiquant le patrimoine de l’église au nom du catholicisme, au nom de ce droit immuable que M. Thouvenel, parlant au nom de la France, déclarait n’avoir vu écrit nulle part ! L’œuvre est assurément nouvelle, aussi nouvelle qu’épineuse.

Il est facile dans un congrès de rétrécir ou d’élargir un état ordinaire qui subit indifféremment les fluctuations de la guerre ou d’une négociation. Ici il s’agit de bien autre chose ; il s’agit de fixer