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sans cesse sous les rayons du soleil les manipulations secrètes qui, dans les poumons de l’animal, s’opèrent au contact de l’atmosphère. Sève ascendante, puis sève élaborée, sang veineux, puis sang artériel, autant de termes corrélatifs deux à deux, double phénomène aussi merveilleux dans le tronc et les branches de l’arbre que dans la poitrine de l’animal, où l’oxygène de l’air, mis en présence du carbone du sang, alimente incessamment le foyer vital.

À côté des analogies, nous ne méconnaissons pas les différences. Elles sont nombreuses et conformes à la loi qui préside aux formations végétales et animales. Qu’importe toutefois que le terme de circulation végétale ne soit pas d’une signification rigoureusement exacte ? Si la sève monte et redescend dans la plante sans parcourir ce circuit où le sang animal est sans cesse refoulé par les pulsations périodiques du cœur, il n’en est pas moins vrai qu’elle chemine sous l’impulsion de certaines contractions propres que les physiologistes n’hésitent pas à comparer à l’irritabilité musculaire. Ces contractions en effet, qu’elles soient végétales ou animales, sont occasionnées par une même activité fonctionnelle que produit un moteur ou excitateur unique, l’oxygène. Ce n’est pas tout. Une manifestation essentiellement vitale et qu’on ne trouve à l’état constant que chez les animaux supérieurs se rencontre dans la plante, à l’état transitoire, il est vrai : il s’agit de la production de la chaleur. Les végétaux ne paraissent pas être doués de la faculté d’engendrer du calorique par leur propre activité et de le maintenir au milieu des variations de l’atmosphère ambiante ; mais il est des époques dans leur existence où une production de chaleur se manifeste d’une façon remarquable : ce sont celles de la germination et de la fécondation. Les affirmations de la science sont formelles à cet égard. « S’agit-il de faire germer un embryon, dit M. Dumas, de féconder une fleur, la plante, qui absorbait la chaleur solaire, qui décomposait l’acide carbonique de l’atmosphère, change tout à coup d’allure. Elle brûle du carbone et de l’hydrogène, devient appareil de combustion, se fait animal en un mot, et comme tel dégage du calorique[1]. »

Ainsi la plante respire, elle se nourrit, c’est-à-dire qu’elle s’incorpore par un travail de savante assimilation des matières inorganiques puisées dans le sol et l’air atmosphérique ; elle possède une sorte de circulation spéciale, produite et réglementée par une contractilité vasculaire parfaitement analogue à celle des tissus animaux, elle jouit enfin à certaines époques du pouvoir de produire un dégagement de calorique relativement considérable.

  1. On a vu, dans la spathe de certaines aroïdées, le thermomètre marquer plus de 20 degrés centigrades au-dessus de l’air ambiant.