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à son ardeur pour retrouver les pages oblitérées de l’antiquité ; la façon dont il avait constitué le texte laissait à désirer. M. Le Clerc, sur ce point, commença l’œuvre de la grande science avec beaucoup d’érudition et de bonheur.

Le projet qui le préoccupait alors était une histoire générale de la littérature latine. On peut dire que le sujet était complètement traité dans son esprit ; il n’y avait pas une partie de ce vaste ensemble qu’il n’eût approfondie. Aux livres il voulut joindre la leçon vivante des voyages. Deux fois, en 1827 et en 1831, il visita l’Italie, la première fois en compagnie de MM. Adrien de Jussieu et J.-J. Ampère, la seconde fois avec M. Valéry. Il noua les relations les plus fructueuses avec les savans de ce pays, surtout avec le cardinal Mai. Ses compagnons cependant profitèrent plus que le public du fruit de ses voyages. Ampère lui dut une partie de ce savoir profond qu’il avait de l’Italie antique. Quant à M. Valéry, il reçut de M. Le Clerc plusieurs de ces indications d’histoire littéraire, de ces charmantes citations, de ces réminiscences pleines d’agrément, qui font de son livre le meilleur guide du voyageur instruit en Italie.

M. Le Clerc compléta plus tard la série de ses voyages littéraires en visitant les savans. les bibliothèques, les universités de Belgique, de Hollande, d’Angleterre et de Suisse. Il n’alla jamais en Allemagne. Il tenait de son éducation certaines préventions contre la science allemande, lesquelles ne cédèrent qu’à l’expérience répétée qu’il fit plus tard de la solidité des travaux historiques et philologiques d’outre-Rhin. Son vaste savoir se dépensait sous les formes les plus variées. Il fut un collaborateur excellent de la Revue encyclopédique, de la Biographie universelle de Michaud, de l’Encyclopédie des Gens du monde, pour les articles de littérature ancienne. Il donnait en même temps au Journal des Débats des études de critique savante, que les hommes lettrés appréciaient. Ce n’était pas le genre un peu superficiel qui a prévalu depuis pour ces sortes d’écrits ; c’étaient de vrais articles critiques, nourris d’analyses et de jugemens. L’avenir préférera peut-être ces solides essais à Ses morceaux où l’envie de briller n’est pas dissimulée, et où la première règle est d’oublier le livre dont on parle pour montrer son talent. On écrivait alors pour un public soucieux du vrai, non pour des lecteurs indifférens à l’instruction et désireux surtout d’être amusés.

Bientôt des devoirs plus graves vinrent le chercher et furent pour lui le commencement d’une nouvelle vie. En 1832, il fut nommé doyen de la Faculté des lettres de Paris en remplacement de M. Lemaire. En 1834, l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres l’appela dans son sein, pour remplir la place devenue vacante par la