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modernes ; c’est d’avoir, par la prudence et l’habileté de sa politique extérieure, assuré à l’Autriche cette trêve, ces perspectives pacifiques dont elle a tant besoin pour sa réorganisation politique et pour l’amélioration de sa condition économique. L’avenir est peut-être encore incertain ; mais, quoi qu’il arrive, l’histoire aura du moins à constater que le premier ministre de François-Joseph est parvenu, en tirant un merveilleux parti des seuls moyens possibles de salut, à suspendre cet effrayant travail de décomposition dont la politique rétrograde de ses prédécesseurs avait semé partout les germes, et qui conduisait rapidement l’empire des Habsbourg à un inévitable écroulement.


III

Maintenant que nous avons vu quelle série de causes remontant au moyen âge ont amené l’adoption du dualisme en Autriche, il nous faut examiner sous quelles formes il a été établi et quelles garanties de durée ou de succès il présente. Le pacte fondamental sur lequel repose l’empire-royaume autrichien a la forme d’un contrat bilatéral désigne communément sous le nom d’Ausgleich. Voté d’abord par la diète de Pesth et tout récemment ratifié par le reichsrath de Vienne, cet acte si important n’est autre chose que le programme développé par M. Deàk dans le journal die Debatte. Voici comment le projet conçu par un avocat de Pesth est devenu la loi de tant de royaumes. Les Hongrois voulaient unanimement l’indépendance du royaume de saint Etienne conformément au droit historique : à aucun prix, ils ne prétendaient être amalgamés dans un empire unitaire ; mais les modérés, inspirés par Deák, admettaient cependant que certains intérêts généraux devaient être réglés en des délibérations communes. Ce programme, la diète de Pesth le fit sien et l’exposa en ces termes dans l’adresse du 24 février 1866 : « nous reconnaissons qu’il y a des choses qui intéressent à la fois la Hongrie et les autres états de votre majesté, et nos efforts tendront, en ce qui concerne le règlement de ces intérêts, à trouver telles combinaisons qui pourront mener au résultat désiré sans porter atteinte à notre autonomie constitutionnelle et à notre indépendance légale. » La diète, sur la proposition de Deàk, nomma en effet une commission de 67 membres, où tous les partis étaient représentés par des hommes éminens, tels que Deák, Eötvös, Andrássy, Trefort, Koloman Ghyczy, Koloman Tisza, Somssich, Gorove, Emerich Mikó, Lónyay, Szentkirályi, Keglevich, Nyári, Jòkai, Apponyi. Après une discussion approfondie, elle soumit à l’approbation de la diète un projet qu’on appela l’élaborat des 67,