Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 75.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 avril 1868.

Puisque le sénat est si peu pressé d’aborder les lois nouvelles soumises à ses délibérations prudentes, et que le corps législatif lui-même se hùte lentement dans cette seconde partie de la session ; puisque le prince de Prusse, au lieu d’être à Berlin cherchant avec le comte de Moltke les moyens de conduire une armée prussienne à Paris, est tout simplement à Turin assistant au mariage du prince Humbert, et que de son côté le maréchal Niel, tranquille à Paris, n’en est point encore à préparer la marche de notre armée sur Berlin ; puisque la paix s’est faite subitement entre tous les hommes de bonne volonté de l’Europe, et que M. Baroche, inaugurant une église à Rambouillet, nous a recommandé de croire à cette paix si désirée ; puisque enfin la politique, prolongeant ses vacances de Pâques, n’est plus depuis quelques semaines là où on a l’habitude de la chercher, dans les discussions des parlemens et dans les incidens diplomatiques, où donc s’est-elle réfugiée pour le moment ? Elle était l’autre jour à l’Académie française, dans cette brillante et retentissante séance où on a parlé de tant de choses, du passé, du présent, de la révolution, de la liberté de conscience, du spiritualisme, du matérialisme, et même un peu de littérature.

La politique s’introduit quelquefois furtivement et fait des apparitions inattendues à l’Académie ; elle y était cette fois bien naturellement dans la personne de ce sincère et viril représentant de la démocratie, M. Jules Favre, conduit par ces deux athlètes des vieilles libertés parlementaires, M. Thiers et M. Berryer, — reçu par cet autre esprit d’une si ferme et si ingénieuse modération dans son incorrigible libéralisme, M. de Rémusat, et venant remplacer le métaphysicien de cette génération qui s’en va, le leader, on a dit l’administrateur de la philosophie contemporaine, M. Cousin. Une coïncidence bizarre avait rassemblé tout exprès ces noms si divers, faits pour représenter toutes les nuances de la vie parlemen-