juif se contente d’égorger et de vérifier si l’animal remplit toutes les conditions exigées; le reste ne le concerne plus et rentre dans les attributions des bouchers ordinaires.
D’un animal mort, rien ne se perd, la sagace industrie sait tirer parti de tout. A l’abattoir même, dans la cour d’entrée, s’élève un pavillon divisé en deux compartimens munis de larges chaudières où l’on prépare les pieds de mouton et les têtes de veau, de façon à les mettre dans l’état où nous les voyons à la porte des boucheries, flottant dans un baquet plein d’eau de puits, car l’eau de rivière les noircit. Les graisses sont gardées avec soin, on a même construit un fondoir dans l’enceinte de l’établissement; mais, à ce qu’il paraît, il pèche singulièrement sous le rapport pratique, car on n’est pas encore parvenu à l’utiliser. La graisse de mouton, lorsqu’elle est de bonne qualité, est employée à faire de la stéarine, qui sert à la fabrication des bougies. Le pied de bœuf fournit une huile dont on use en horlogerie. Les gros intestins du bœuf sont achetés par les charcutiers, qui en enveloppent quelques-uns de leurs produits; les intestins grêles sont expédiés en Espagne, où l’on sait en confectionner certains saucissons très recherchés au-delà des Pyrénées; les intestins grêles de mouton deviennent des cordes à violon; les os font du noir animal. Tous les détritus absolument inutiles sont réunis au fumier et forment avec ce dernier un engrais assez recherché, car en 1867 il s’en est vendu à l’abattoir central pour la somme de 16,000 francs.
Les bouchers ne sont plus aujourd’hui ce qu’ils ont été jadis, une corporation toute-puissante, formée d’un certain nombre de familles privilégiées et imposant souvent leurs volontés à Paris, ainsi qu’ils le firent sous le règne de Charles VI, lorsqu’ils prirent parti pour le duc de Bourgogne contre les Armagnacs. En 1411, les Saint-Yon, les Goys, dirigés par leur chef Caboche, eurent assez d’influence pour forcer le roi à substituer dans ses emblèmes la couleur blanche à la couleur bleue. On peut penser que, lorsque les Armagnacs rentrèrent à Paris, ils ne ménagèrent point de pareils adversaires. On rasa les grandes boucheries du Châtelet et du parvis Notre-Dame, qui étaient devenues des lieux de rassemblemens redoutables. Ce fut là en réalité un coup de mort pour la corporation, qui n’arriva jamais à se reconstituer d’une façon exclusive. Plus tard, en février 1587, Henri III continua l’œuvre de destruction, et ouvrit le commerce de la boucherie à tous ceux qui se montrèrent capables de l’exercer. Néanmoins il en fut des bouchers comme des boulangers, la prétendue liberté dont ils jouissaient n’était qu’illusoire, et la loi du 19-22 juillet 1791 réserva provisoirement à l’autorité municipale le droit de fixer la taxe de la viande. On sait ce