La vie parlementaire s’est réveillée tout à coup, et vient d’offrir pendant quelques jours un spectacle attachant, presque imposant, presque dramatique, tant on s’est porté au feu de part et d’autre avec entrain et même avec passion. Après un bon temps de repos, corps législatif et sénat se sont remis à l’œuvre avec la sève du printemps, et deux semaines durant nous avons vu se dérouler des débats instructifs, substantiels, animés, remuant les intérêts les plus vivaces et les plus divers, touchant d’un côté à tout le régime économique du pays, de l’autre à la direction philosophique de l’enseignement supérieur, embrassant en un mot tout ce qui compose la civilisation d’un peuple. Tous les élémens de la fortune morale et de la fortune matérielle de la France ont été passés en revue, analysés, discutés avec une verve presque surabondante. Des torrens d’éloquence se sont déchaînés ; les discours en deux journées ont été inaugures dans nos chambres comme aux États-Unis, comme en Italie ou en Espagne. On s’est un peu grisé de la parole sous l’influence des chaleurs nouvelles. Ce n’est pas que l’issue de ce drame parlementaire, si tant est que le drame n’ait pas touché quelquefois un peu à la comédie, ce n’est pas que l’issue de ce double tournoi ait paru un moment incertaine, même dès le premier jour. Malheureusement dans ces luttes renaissantes de la tribune il manque encore quelque chose : il manque ce qui les relève, ce qui en fait la force et le prix, ce qui en est surtout la sanction, l’autorité d’un vote chaudement disputé, sortant en quelque façon des entrailles de la discussion et déterminant la direction d’une politique. Dans nos chambres, on ne s’attend guère à l’imprévu d’un scrutin ; ce n’est pas le vote qui est le plus important. L’éloquence se déploie, toutes les dissidences éclatent, les opinions ont l’air de se heurter avec une vivacité et une ardeur qui feraient croire à